Plus de 500 000 articles scientifiques ont été publiés sur ou autour de la COVID-19 entre janvier 2020 et avril 2022 : c’est du jamais vu dans l’histoire de la science.
Cela ne représente pourtant que 4 % de tous les articles publiés pendant cette période. Mais c’est une quantité énorme d’efforts consacrés par la communauté scientifique internationale au seul virus SARS-CoV-2. Le chiffre provient d’une analyse des données bibliographiques effectuée par Philip Shapira, de l’Université de Manchester, et pré-publiée récemment.
Rien qu’en virologie, le virus SARS-CoV-2 représente à lui seul près du tiers des études faites en 2021, contre 3,1 % en 2019.
Toutefois, tous les scientifiques qui ont publié sur le coronavirus n’étaient pas experts du sujet. Dans une étude parue en juillet 2021, Dashun Wang et son équipe, de la Northwestern University, estimaient que les deux tiers des études publiées sur la plateforme de prépublication ArXiv (où sont déposées des études qui n’ont pas encore été révisées par les pairs) provenaient d’auteurs qui n’avaient aucune publication antérieure sur des sujets liés aux coronavirus. Ce qui représente un problème, appelé par certains chercheurs « la covidisation de la recherche » notait récemment un reportage de la revue Science : certains scientifiques « craignent que trop de chercheurs se soient lancés dans des travaux situés à l’extérieur de leur champ d’expertise, résultant en des études de faible qualité ».
Dans des domaines comme la médecine d’urgence ou les maladies du système respiratoire, le nombre de recherches en rapport avec la COVID-19 est, pour les quatre premiers mois de 2022, stable ou en baisse par rapport à 2021, note Philip Shapira.
Interrogé par Science, Alimmuddin Zumla, chercheur en maladies infectieuses du Collège universitaire de Londres, n’est pas surpris par ces résultats. « Maintenant que les connaissances épidémiologiques ont été acquises, la plupart des chercheurs et des épidémiologistes reviennent à leurs principaux centres d’intérêt. Ce n’est pas une mauvaise chose. Beaucoup de maladies infectieuses potentiellement mortelles ont été négligées pendant la COVID-19, et elles ont besoin d’attention. »
Les chercheurs « seniors » ont plus de facilité à revenir à leurs spécialités que les jeunes chercheurs. Certains de ces derniers se sont éloignés de leur champ de recherche pour bénéficier pendant la COVID de conditions de travail exceptionnelles dans des laboratoires très bien financés. Plusieurs se demandent s’ils sauront trouver les mêmes financements pour démarrer leurs propres recherches, dans l’après-pandémie.