L’hécatombe provoquée par la sécheresse dans l’est de l’Afrique ne semble pas vouloir s’arrêter : selon Oxfam et l’organisation Save the Children, en Éthiopie, au Kenya et en Somalie, le manque d’eau fait une victime toutes les 48 secondes. Un nouveau rapport dénonce par ailleurs le manque d’action des gouvernements étrangers pour lutter contre cette crise.
Le document en question, publié plus tôt cette semaine, trace un parallèle avec une autre famine d’envergure qui a frappé la région, il y a 11 ans : la catastrophe avait alors tué plus de 260 000 personnes en Somalie seulement, dont la moitié était des enfants de moins de 5 ans.
« Aujourd’hui, près de 500 000 personnes dans plusieurs régions de la Somalie et de l’Éthiopie vivent dans des conditions proches de la famine. Au Kenya, 3,5 millions de personnes souffrent de faim extrême », soulignent les auteurs du rapport.
Ces derniers ne mâchent pas leurs mots pour affirmer que les fonds recueillis par les appels d’urgence sont « terriblement insuffisants ». Pire encore, juge-t-on, d’autres crises d’ampleur planétaire, comme la guerre en Ukraine, viennent aggraver la situation. L’impact de l’invasion russe sur le marché alimentaire, bien documentée, est manifeste : après tout, la Russie est l’un des principaux exportateurs de blé, mais aussi d’autres produits alimentaires, comme des composantes destinées à la production de l’engrais. Idem pour l’Ukraine, dont une bonne partie de la production céréalière, notamment destinée au Moyen-Orient, mais aussi à l’Afrique, est coincée dans des ports jouxtant la mer Noire, sans possibilité de l’exporter, en raison du blocus russe.
Les appels se multiplient, depuis plusieurs jours, pour que ces céréales, entassées dans des entrepôts, puissent être vendues, plutôt que de pourrir sur place.
Des millions de personnes risquent la mort
De leur côté, les auteurs du rapport sur l’Éthiopie, le Kenya et la Somalie affirment que « le nombre de personnes en situation de faim extrême dans ces trois pays a plus que doublé depuis l’année dernière, passant de plus de 10 millions à plus de 23 millions aujourd’hui. Ce constat s’inscrit dans le contexte d’une dette accablante qui a plus que triplé en moins de 10 ans (passant de 20,7 milliards de dollars en 2012 à 65,3 milliards de dollars en 2020) et qui ampute les ressources que ces pays pourraient affecter aux services publics et sociaux « .
Après une autre famine, survenue cette fois en 2017, la communauté internationale serait encore trop lente et trop timide dans ses actions pour non seulement offrir de l’aide d’urgence pour soulager les populations touchées en ce moment, mais aussi poser les jalons servant à éviter de futures crises.
« Le rapport souligne que l’excès de bureaucratie et les choix politiques intéressés continuent d’entraver une réponse cohérente à l’échelle mondiale, malgré l’amélioration des systèmes d’alerte et en dépit des efforts déployés par les ONG sur le terrain », écrivent Oxfam et Save the Children, dans une note d’information accompagnant leurs travaux.
De fait, malgré un appel de fonds à hauteur de 4,4 milliards de dollars pour ces trois pays lancé par l’ONU, à peine 2 %, soit un peu plus de 93 millions, ont été recueillis à ce jour.
« Encore une fois, malgré des signes avant-coureurs alarmants, les dirigeants du monde ont réagi trop tard et de façon trop peu convaincante pour éviter que des millions de personnes se retrouvent dans une situation de faim catastrophique. Plusieurs facteurs sont en jeu lorsqu’il y a une menace de famine, mais c’est toujours le signe d’un échec politique », affirme Denise Byrnes, directrice générale d’Oxfam-Québec.
Outre la guerre en Ukraine, plusieurs autres facteurs, comme les changements climatiques et les conflits armés, ont contribué à détériorer la situation humanitaire dans plusieurs régions du globe, où des millions de personnes sont en situation de famine.