Sur la belle scène de l’Usine C, 14 artistes, danseurs, acteurs, mimes, acrobates présentent une vision très personnelle de Jésus par Philippe Boutin, ainsi que de l’écho que le personnage peut avoir dans l’esprit d’un enfant. Au cœur de cette création totalement déjantée et saturée de références à la culture populaire cinématographique souvent très drôles, le chorégraphe Elon Höglund offre de très belles séquences de ballets contemporains. Un mélange de genres dont on peut dire qu’il est à la fois audacieux et risqué.
Deux heures de spectacle, deux « chapitres » d’un récit qui s’interrompt par un « à suivre », promettant une deuxième partie. Philippe Boutin affectionne les œuvres grand format, avec beaucoup d’intervenants, de références, de lieux, de décors, de bruitages et de protagonistes différents, de parties et de sous-parties.
Locky, une divinité espiègle qui ressemble un peu au Puck de Shakespeare, intervient comme un maître de cérémonie pour entrainer le public, lui offrir quelques commentaires ou explications, lui demander de participer à certaines parties d’une histoire qui se déroule sous nos yeux avec deux personnages principaux, Willie – un enfant qui grandit et qui rêve de revêtir les attributs d’un sauveur – pour le chapitre 1, et Jésus pour le chapitre 2.
En arrière-plan, l’univers de Star Wars imbriqué avec celui du Seigneur des anneaux ou de Jurassic Park, règle les affaires politiques du monde. Débutant comme Fargo des frères Coen, trois anges sont découverts assassinés, ce qui ne manquera pas de déplaire à l’impératrice au pouvoir… On est en pleine culture populaire contemporaine. Mais les références à la vraie histoire de Jésus, voire à celle du judaïsme qui l’a précédé, ne manquent pas non plus, avec buisson ardent qui se transforme en sapin de Noël et massacre des Innocents ou décrets de Pharaon à l’égard des Premiers Nés, comme on voudra.
On l’imagine sans difficulté, le spectacle offre de multiples surprises. Présenté un peu comme une série de sketchs plus ou moins reliés les uns aux autres, le spectacle fait alterner des moments très comiques par leurs références, leur contenu ou leur jeu, et d’autres où c’est l’esthétique qui domine grâce à des danseurs talentueux sur fond de musiques hétéroclites mais d’excellente qualité.
Le spectacle est non seulement ponctué d’intermèdes de danse, mais aussi d’arts martiaux, de mime, d’acrobaties ou de clowneries circassiennes. Certaines sont pleines d’humour; d’autres, très poétiques. Les mots sont rares (et parfois malheureusement inaudibles), et c’est la gestuelle qui domine. Le tout donne un spectacle un peu déroutant, sans doute, mais intéressant, avec quelques séquences particulièrement réussies, d’autres qui semblent s’étendre un peu trop, mais dont on ressort la tête pleine et le sourire aux lèvres.
The Rise of the Blingbling – La Genèse du 17 au 21 mai 2022 à l’Usine C, à Montréal