Si l’insécurité alimentaire avait déjà atteint des sommets, en 2020, voilà qu’un nouveau rapport du Réseau mondial contre les crises alimentaires (GNAFC), un organisme lié aux Nations unies, évoque le pire bilan depuis des années, avec près de 193 millions de personnes, vivant dans 53 pays ou territoires, qui ne mangent pas à leur faim.
Ainsi, le nombre de personnes souffrant de manque de nourriture a bondi d’un peu moins du quart, en un an, avec 40 millions d’individus qui se sont ajoutés à ce total.
« Parmi celles-ci, plus d’un demi-million de personnes (570 000) en Éthiopie, dans le sud de Madagascar, au Soudan du Sud et au Yémen ont été classées dans la phase la plus grave de l’insécurité alimentaire aiguë de type Catastrophe et ont nécessité une action urgente pour éviter l’effondrement généralisé des moyens de subsistance, la famine et la mort », mentionne l’ONU dans un résumé du rapport.
Toujours au dire de l’organisation internationale, « si l’on considère les 39 pays ou territoires présentés dans toutes les éditions du rapport, le nombre de personnes confrontées à l’insécurité alimentaire en phase de crise ou pire a presque doublé entre 2016 et 2021, avec des hausses ininterrompues chaque année depuis 2018 ».
Causes multiples
S’il est facile d’établir un lien entre l’impact de la pandémie et l’accès à la nourriture, la COVID-19 et son effet sur les chaînes d’approvisionnement et la santé des populations produisant des denrées agricoles n’est pas le seul facteur en cause.
De fait, la multiplication des conflits, l’accroissement des catastrophes environnementales et des phénomènes météorologiques extrêmes, mais aussi les chocs économiques (liés ou non à la pandémie) sont autant de facteurs qui ont un impact négatif sur l’accès à la nourriture et sur la solidité des sources d’approvisionnement.
Parmi toutes ces causes, ce sont les conflits armés qui touchent le plus de personnes, avec 139 millions de gens touchés dans 24 territoires. En 2020, on en comptait « uniquement » 99 millions.
Les conditions météo, elles, sont la principale cause de la faim aiguë chez plus de 23 millions de personnes, en hausse par rapport à 15,7 millions en 2020.
Enfin, seule nouvelle positive, les chocs économiques ont eu un impact moindre sur l’accès à la nourriture, en 2021, alors que l’on estimait à plus de 30 millions de personnes principalement touchées par ce facteur, contre 40 millions l’année précédente, moment où la pandémie a éclaté.
« La faim aiguë atteint des niveaux sans précédent et la situation mondiale ne cesse d’empirer. Les conflits, la crise climatique, la COVID-19 et la flambée des prix des denrées alimentaires et du carburant ont créé une tempête parfaite – et maintenant, la guerre en Ukraine ajoute une catastrophe à la catastrophe. Des millions de personnes dans des dizaines de pays sont poussées au bord de la famine. Nous avons besoin d’un financement d’urgence pour les sortir du gouffre et renverser cette crise mondiale avant qu’il ne soit trop tard », a déclaré le Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial (PAM), David Beasley.
De son côté, le directeur général de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, Qu Dongyu, juge que les différents pays de la planète n’en font pas assez pour combattre les diverses crises en s’attaquant à leurs causes, plutôt qu’à leurs symptômes.
« Alors que la communauté internationale a courageusement répondu aux appels à une action urgente de prévention et d’atténuation des famines, la mobilisation des ressources pour s’attaquer efficacement aux causes profondes des crises alimentaires dues, entre autres, aux impacts de la pandémie de COVID-19, à la crise climatique, aux points chauds mondiaux et à la guerre en Ukraine, peine toujours à répondre aux besoins croissants », a-t-il déclaré.