D’un côté, il y a Bill Gates qui, à ce que prétendent certains des plus virulents opposants aux mesures sanitaires, voudrait nous injecter des puces électroniques avec les vaccins. De l’autre, il y a Elon Musk, qui a bel et bien dit, lui, qu’il voudrait nous implanter des puces électroniques dans le cerveau, ce qui ne semble pas émouvoir ces mêmes opposants.
Il est vrai que Bill Gates est perçu comme « de gauche » alors qu’Elon Musk est perçu comme « de droite ». Ceci explique peut-être cela, sachant que l’opposition aux mesures sanitaires liées à la pandémie a souvent été associée à des groupes idéologiquement campés à droite, et que les groupes actuellement les plus enthousiasmés par la prise de contrôle de Twitter par Elon Musk sont idéologiquement campés à droite, voire partisans de Trump. Quant à Elon Musk, il a notamment qualifié de « fascistes » les mesures de confinement, a comparé Justin Trudeau à Hitler et soutenu l’occupation d’Ottawa par les camionneurs.
Or, Elon Musk défend ouvertement depuis au moins 2016 son intention d’implanter des puces électroniques dans le cerveau: l’idée, tout dépendant du contexte où il la présente, est de nous « connecter » avec des ordinateurs ou d’augmenter nos capacités cognitives ou simplement, comme il le disait au Sommet mondial de Dubaï, en 2017, de « fusionner avec des machines ». Il a même créé une compagnie en 2016, Neuralink, dont l’objectif est de créer une puce qui pourrait être implantée par chirurgie dans le cerveau.
D’après une présentation webdiffusée en 2019, un réseau de micro-fils relierait la puce à différentes régions du cerveau et le tout pourrait envoyer des données à un ordinateur. La compagnie affirme pouvoir procéder à des premiers essais cliniques cette année, quoique les experts ont souvent évoqué qu’on était très loin d’hypothétiques applications pratiques.
En comparaison, rappelons que Bill Gates n’a jamais parlé de puces électroniques et de vaccins: il a tout au plus évoqué — dans une discussion sur Reddit en 2020 — l’idée de créer un jour des « carnets de santé numérique », qui seraient des dossiers personnels entreposés quelque part dans le nuage numérique. Il n’a jamais parlé non plus de réduire la population mondiale — ni par les vaccins ni autrement. Mais il est devenu, à l’inverse d’Elon Musk, la cible d’attaques hostiles des mouvements conservateurs.
Même The Federalist, un magazine conservateur américain, s’étonne de cette complaisance à l’égard de Musk. À titre d’exemple, une autre tête de Turc de la droite et des cercles complotistes, Klaus Schwab, fondateur du Forum économique mondial, fait régulièrement l’objet d’attaques pour ses déclarations — souvent sorties de leur contexte— sur le « transhumanisme » et les liens futurs entre le numérique et la biologie. Des propos qui, pourtant, ne génèrent aucune réaction des mêmes cercles quand ils proviennent d’Elon Musk.