La mise en place d’un revenu minimum garanti partiel destiné aux jeunes Français pourrait offrir une aide substantielle pour les populations désavantagées, affirment les auteurs d’une nouvelle étude.
Les travaux en question, réalisés par des chercheurs des Universités de Bath et d’Essex, au Royaume-Uni, s’intéressent également aux démarches nécessaires pour financer de telles initiatives.
La publication de l’étude survient alors que le premier tour de l’élection présidentielle française vient de se conclure par le passage au second tour du président sortant, Emmanuel Macron, et de la candidate du Rassemblement national, Marine Le Pen (extrême droite). Les deux politiciens, comme plusieurs autres candidats en lice, on promit de protéger et développer le « pouvoir d’achat des Français ».
L’un de ces autres candidats, Jean-Luc Mélenchon, de La France insoumise, souhaitait notamment instaurer un revenu minimum garanti de 1063 euros par mois pour tous les étudiants français.
Revenu garanti pour tous les jeunes
L’auteur de l’étude, le professeur Matteo Richiardi, affirme que l’idée d’un revenu minimum garanti est crédible en France, mais soutient que le fait de cibler directement les étudiants pourrait s’avérer être une méthode régressive, puisque la plupart proviennent de milieux mieux nantis et ont également plus de chances d’obtenir des postes bien rémunérés plus tard. Les travaux avancent plutôt la possibilité de verser une allocation plus faible (337 euros par mois), mais pour tous les jeunes âgés de 20 à 24 ans, et pas seulement les étudiants.
Une telle décision permettrait à tous les jeunes d’entrer progressivement sur le marché du travail, et donc de développer leur capacité à vivre de façon indépendante. L’allocation servirait aussi de test en vue d’un revenu minimum garanti élargi à toute la population, une idée qui gagne des adhérents un peu partout sur la planète depuis plusieurs années.
De plus, l’impact de l’allocation serait important pour les jeunes et leur famille, mais les effets seraient aussi ressentis dans l’ensemble de la population. Toujours selon l’étude, cela pourrait entraîner une diminution de 1,1 point du taux de la population qui est à risque de sombrer dans la pauvreté, dans l’Hexagone. Les impacts seraient les plus marqués chez les ménages à plus faible revenu, et les pertes seraient plus importantes chez les mieux nantis, ce qui porte à croire que la mesure pourrait aussi servir à redistribuer la richesse.
Comment payer pour cette mesure?
Les chercheurs estiment cependant que les politiciens et décideurs devront s’attaquer à une question importante, s’ils décident d’aller de l’avant avec l’idée d’un revenu minimum garanti: comment payer? Pour y répondre, les travaux analysent les coûts des différentes stratégies, par rapport à leur impact sur la pauvreté et l’inégalité: ces évaluations vont d’un revenu minimum garanti pour tous les adultes à des programmes ciblant seulement un groupe d’individus.
En ce qui concerne les coûts, l’étude a révélé qu’un programme universel nécessiterait une importante réforme fiscale, y compris des hausses d’impôts et des changements apportés aux systèmes existants. En comparaison, un programme destiné aux étudiants pourrait être plus facilement mis sur pied, financé à l’aide d’une hausse fiscale d’à peine 3 %, et sans changer les allocations et les avantages existants.
Pour le Pr Richiardi, « le revenu minimum garanti est une option crédible en matière de réforme fiscale en France; cependant, les décideurs font face à des inconvénients importants. Pour qu’un tel revenu soit efficace pour protéger les plus vulnérables, il faut que le programme soit vaste, mais cela implique évidemment des hausses fiscales et des modifications importantes aux structures financières existantes ».
De son côté, le Dr Joe Chrisp, spécialiste du revenu minimum, ajoute que « récemment, le débat mondial sur le revenu minimum garanti a pris de l’ampleur d’une façon qui aurait été inimaginable il y a 10 ans, mais n’a toujours pas débouché sur des réformes concrètes. Cette étude trace un portrait clair de certaines options politiques qui sont offertes aux décideurs voulant mettre en place un revenu minimum garanti en France ».
« Si plusieurs pays ont effectué des tests ciblés, la proposition consistant à choisir un tel revenu pour les jeunes laisse entrevoir une autre réforme excitante qui pourrait à la fois servir de test pour un revenu universel, et s’attaquer à des problèmes plus immédiats en termes de filet social chez les jeunes. »