Nul besoin, sans doute, de présenter Emmanuel Schwartz, interprète plus que talentueux avec un penchant pour ce qui sort de l’ordinaire, voire pour la transcendance théâtrale. Le voilà donc qui, dans le cadre du Festival international du film sur l’art (FIFA), propose une mise en abyme intitulée Projet Pigeons.
Dans un groupe de finissants d’une école de théâtre, on apprend l’impensable: l’un des étudiants s’est enlevé la vie. Catastrophés, ses camarades (et amis, et amants) sont précipités dans une réalité auparavant impossible à envisager, soit celle de la mortalité, de la fin de l’innocence, du fait de voir ses ailes être coupées en étant pourtant si près du but, si près du début d’une carrière dans le milieu à la fois exigeant et libérateur de l’art de la scène.
Emmanuel Schwartz a toutefois quelques as dans sa manche, puisque ce drame prend soudainement une tournure tout autre, la mort de l’étudiant en question s’inscrivant dans le contexte… d’une pièce de théâtre. Qui, elle-même, semble faire partie d’une autre pièce, qui s’inscrit enfin dans le film que peuvent voir les spectateurs.
Si cette formule peut dévier assez largement de la structure traditionnelle des documentaires présentés au FIFA, M. Schwartz, aux commandes du scénario, de la réalisation et de la production, est en parfait contrôle de ses moyens, et n’hésite pas à se servir de sa vision de l’art théâtral pour proposer une expérience qui sort de l’ordinaire, certes, mais qui permet d’emmener les cinéphiles dans un voyage pratiquement intersidéral. Les différents niveaux de jeu font en sorte que Projet Pigeons est un moment cinématographique plus que complet, avec des pleurs, de l’espoir, de l’ironie, de l’absurde…
Bien sûr, il peut être dépaysant, dans un certain sens, de voir ces jeunes évoquer l’aspect libérateur de l’art, ainsi que son côté cathartique, en allant même jusqu’à envisager, à mots couverts, la fin de cette passion dans la foulée de la mort de leur ami. Certes, il s’agit d’un scénario, mais à bien y réfléchir, ce désir brûlant d’aller au-delà de la « simple » condition humaine pour tenter de ne faire qu’un avec la scène, avec l’art du théâtre, rappelle, de façon très efficace, que la vie, ce n’est pas seulement rester chez soi en attendant le prochain confinement, ou consommer des produits, même si ces produits sont culturels. Non, la vie, c’est aussi tenter de trouver une raison d’être, d’explorer le merveilleux, de toucher à quelque chose de plus grand que soi (de toucher au divin, faute d’un mot plus approprié). Et cela, Projet Pigeons le fait d’une façon fantastique.
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