Avec plus de deux millions de réfugiés qui ont trouvé refuge à l’extérieur du pays, sans doute un nombre encore plus grand de déplacés internes ayant fui les combats et l’avancée de l’armée russe, la guerre en Ukraine est une véritable catastrophe sur le plan humanitaire. Et pour l’une des responsables de CNEWA Canada, le conflit a non seulement un impact sur son travail, mais aussi sur sa vie personnelle.
Au bout du fil, Anna Dombrovska, agente de projet pour cette organisation liée à l’Église catholique (l’acronyme CNEWA signifie Catholic Near East Welfare Association, ou Association catholique d’aide à l’Orient, NDLR), explique que deux projets qui étaient en cours dans autant de villes de l’est de l’Ukraine, à Kharkiv et à Marioupol, soit un centre de prêt d’équipement médical et l’équivalent d’une soupe populaire, respectivement, ont dû être suspendus.
Les troupes russes ont effectivement encerclé ces deux villes stratégiques, toujours techniquement sous le contrôle des forces ukrainiennes, mais qui sont régulièrement bombardées. À Marioupol, l’électricité et l’eau courante seraient coupées depuis plusieurs jours.
« La troisième ronde de négociations entre l’Ukraine et la Russie, qui a entre autres porté sur la création de corridors humanitaires pour évacuer les civils de ces endroits ont échoué… En fait, il y a eu un accord, mais les Russes ont ensuite bombardé les corridors en question », forçant l’abandon des tentatives d’évacuation, rappelle Mme Dombrovska.
« L’aide humanitaire que notre partenaire sur place tentait de livrer à Marioupol a elle aussi été la cible de tirs d’artillerie… Cela témoigne de l’importance de la violence dans cette partie de l’Ukraine. En gros, tout ce que nous faisions dans l’Est a été suspendu », ajoute-t-elle.
Les activités de CNEWA, ou plutôt les activités réalisées avec des partenaires sur le terrain, ont ensuite été transférées à Zaporijia, un peu plus à l’ouest, mais cette ville est aussi le site où se trouve la plus importante centrale nucléaire d’Europe, dont les troupes russes se sont emparées, après avoir ouvert le feu contre les installations.
Cette attaque a d’ailleurs poussé le ministre ukrainien des Affaires étrangères, tout comme le président Volodymyr Zelensky, à mettre en garde contre une « catastrophe nucléaire 10 fois pire que Tchernobyl », dont l’ancienne centrale nucléaire, située sur un site largement irradié et abandonné après l’explosion de 1986, a aussi été conquise par les Russes au début de la guerre.
Des spécialistes du nucléaire ont cependant précisé, peu de temps après, que la centrale de Zaporijia avait été construite plus solidement que celle de Tchernobyl, et que les combats avaient certes déclenché un incendie sur le site de la centrale, mais que celui-ci avait été circonscrit à un bâtiment extérieur, sans affecter la production d’énergie.
Voir les siens partir… ou rester
« Les habitants de l’est, du sud et du centre de l’Ukraine fuient vers l’ouest du pays, et passent ensuite dans les pays voisins, dont la Pologne, la Hongrie, la Roumanie, la Slovaquie, etc. », indique encore Anna Dombrovska.
« Seules les femmes et les enfants peuvent quitter le pays; les hommes doivent rester pour défendre le pays. »
Sur le terrain, les partenaires de CNEWA, notamment l’Église catholique ukraino-grecque, l’Université catholique ukrainienne et la nonciature du Vatican (l’équivalent d’une ambassade, NDLR), ont maintenant installé leurs bureaux à Lviv, près de la frontière avec la Pologne, à l’exception de la nonciature, qui est toujours installée à Kiev.
Pour faire face à la situation et poursuivre sa mission humanitaire, CNEWA Canada récolte des fonds, et a reçu l’aide d’un couple albertain prêt à égaler les dons jusqu’à hauteur de 500 000 $, entre autres contributions. L’organisation, de son côté, dit avoir aussi reçu 340 000 $ provenant d’autres donateurs. « Cela témoigne de la générosité des gens », indique Mme Dombrosvka.
Heureusement, il est encore possible de contacter des gens en Ukraine, puisque les réseaux de téléphonie, internet et les réseaux de télévision fonctionnent toujours, du moins dans la capitale et dans l’ouest du pays.
« J’ai pu contacter tous nos partenaires sur le terrain, là-bas… Et même à Kiev, j’ai pu rejoindre ma grand-mère », souligne Mme Dombrovska.
« C’est un sujet difficile, mais elle ne veut pas partir. Bien des Ukrainiens veulent défendre leur terre, ils ne veulent pas s’en aller. Les autres membres de ma famille ont décidé de partir – enfin, les femmes; les hommes restent pour défendre autant qu’ils le puissent. »
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