La pandémie de COVID-19 est la pire crise de santé publique depuis un siècle. Elle a d’ailleurs poussé des gouvernements à adopter des mesures sans précédent pour encadrer la vie des citoyens, et ceux-ci ont souvent dépensé sans compter pour amoindrir l’impact sur les finances personnelles et celles des entreprises. Pourtant, selon une étude britannique, la population ne serait pas spécialement portée à élargir le filet de protection sociale déjà en place avant la crise.
Cette conclusion peut surprendre, puisque certains experts ont précédemment laissé entendre que le fait de vivre la crise de la COVID-19 aurait un effet si important qu’elle représenterait un « point tournant » dans l’histoire, le tout en faveur d’un changement profond du fonctionnement des économies et des sociétés.
Toutefois, la mise en place d’une transformation importante en matière de politiques publiques pourrait s’avérer particulièrement difficile, à moins que cela ne s’inscrive dans un contexte où l’opinion publique est favorable.
Au Royaume-Uni, trois sondages effectués entre l’été 2020 et l’été 2021, qui contenaient certaines questions qui se trouvaient déjà au coeur du coup de sonde British Social Attitudes, avant la pandémie, révèlent que 64 % des répondants jugent que « les gens ordinaires n’obtiennent pas leur juste part des richesses nationales », alors que 66 % des personnes interrogées estiment qu’il est vrai « qu’il existe des lois pour les pauvres, et des lois pour les riches ».
Cependant – et même si pandémie a très largement davantage touchés les personnes à faible revenu, les minorités ethniques, les femmes et autres populations désavantagées –, seulement 43 % des sondés sont d’accord avec l’idée que « le gouvernement redistribue mieux les revenus des plus riches pour aider les moins nantis », soit un résultat similaire aux 42 % de personnes interrogées qui pensaient la même chose avant la pandémie.
Un certain point de vue par rapport aux personnes moins bien nanties semble persister, même à la suite de l’éclatement de la pandémie. L’un des sondages révèle effectivement qu’à peine 44 % des participants sont en désaccord avec l’affirmation voulant que « plusieurs personnes qui reçoivent de l’aide de l’État n’ont pas vraiment besoin d’assistance », soit un résultat presque identique aux 42 % de personnes sondées qui partageaient cet avis auparavant.
De la même manière, 40 % des participants réfutent l’argument voulant que « la plupart des gens au chômage fraudent d’une façon ou d’une autre », comparativement à 39 % avant la pandémie.
Changements à long terme
Selon les auteurs des sondages, si les perspectives à propos de l’aide sociale n’a pas beaucoup changé durant la pandémie, elles ont toutefois largement évolué par rapport aux opinions exprimées 10 ans auparavant. Entre 2002 et 2012, à peine 29 % s’opposaient à l’idée que la plupart des récipients de cette aide ne la méritaient pas, tandis que seulement 27 % des sondés croyaient qu’il était faux que la plupart des personnes moins bien nanties étaient des fraudeurs.
Après une époque où la plupart des gens étaient relativement peu ouverts à l’idée des programmes d’aide, la perception du public à ce propos s’est largement transformée bien avant l’éclatement de la crise sanitaire.
Selon les coups de sonde, le changement fut le même en ce qui concerne la taxation et les dépenses publiques. À la suite de la crise financière de 2007-2008, à peine 35 % des participants estimaient que le gouvernement devrait « accroître la taxation et dépenser davantage en matière de santé, d’éducation et de programmes sociaux ». Cependant, en date de 2017-2019, cette proportion était passée à 57 %.
Ce taux a légèrement baissé pendant la pandémie, pour atteindre 51 %, mais la forte augmentation des dépenses gouvernementales pendant la pandémie a été accompagnée d’une opinion publique qui était déjà favorable à une certaine expansion du rôle de l’État.
Pour les auteurs des sondages, la pandémie ne représente pas un moment décisif, dans l’opinion publique, mais plutôt un baromètre des attitudes sociales et politiques déjà présentes au Royaume-Uni. L’inégalité de la pandémie a stimulé le débat public parce que plusieurs citoyens britanniques s’inquiétaient déjà des disparités entre les différents groupes de citoyens, juge-t-on.
Plutôt que de devoir s’adapter à une nouvelle vision de la société, les décideurs politiques devront plutôt, dans le contexte post-pandémique, identifier les meilleures méthodes pour répondre à une opinion publique différente qui était déjà présente depuis un certain temps.
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