En littérature ou en musique, une rhapsodie est une œuvre composée de différents morceaux, juxtaposés, décousus, presque désordonnés, mais qui – bien sûr – forment un tout. C’est ce que signe Sylvain Émard pour sa compagnie: 20 danseurs sur une scène relativement réduite, autant dire une foule, et qui pendant plus d’une heure réalise une performance époustouflante de désordre apparent.
C’est au Studio-Théâtre de l’Édifice Wilder qu’est présentée cette chorégraphie dans le cadre de Danse Danse. Les spectateurs entourent la scène rectangulaire et se trouvent dès lors, à proximité des danseurs. Ceux-ci sont déjà sur scène à leur entrée, et ils ont déjà démarrés certains de leurs mouvements.
C’est comme si les danseurs avaient besoin d’une mise en condition non seulement physique, mais psychique avant le début du spectacle. L’impression, tout au long de la performance extrêmement exigeante, est qu’il y a quelque chose de la transe non simulée qui doit les envahir pour parvenir à ce qu’ils réalisent.
Les mouvements, pleins d’énergie, sont à la fois répétitifs et très variés, coordonnés mais aussi désordonnés. Cette foule fait corps mais se sépare à l’occasion en deux, en quatre ou en cinq groupes distincts, voire en individualités. Les vêtements des artistes ne sont pas travaillés. Tous portent des tenues colorées qui semblent simplement sorties de leurs garde-robes personnelles. Cependant, lorsque des groupes se distinguent, on perçoit des harmonies de couleurs – plutôt tons chauds d’un côté et tons froids de l’autre – finement réfléchies.
Il y a quelque chose du rituel dans leur savante gestuelle, un rituel qui reste éloigné des capacités d’interprétation du spectateur. Celui-ci se sent étranger à ce qui se passe devant ses yeux. Il assiste à une sorte de danse tribale occidentale moderne, une invocation qu’il ne saisit pas. Les danseurs sont peut-être dans la même situation car l’impression aussi est qu’ils forment un tout organique, et qu’ils ne sont que des pièces d’un grand ensemble qui a son propre mouvement, indépendant de ses parties. Un peu comme un vol d’étourneaux dans le ciel ou les pattes d’une sorte de pieuvre dont les parties ont leurs activités indépendantes mais qui pourtant forment un ensemble parfaitement cohérent.
Rhapsodie
Sylvain Émard Danse
Danse Danse
Du 22 au 26 février au Studio-Théâtre du Wilder