Les Québécois manquent généralement de sommeil, répètent les experts, à l’instar des citoyens de bon nombre d’autres pays. Un adulte en santé devrait dormir, à ce qu’on dit, au moins huit heures par jour pour récupérer et être en bonne santé physique et mentale. Mais d’où vient cette règle, s’est demandé le Détecteur de rumeurs.
Il est certain que le manque de sommeil —et dans certains cas, l’excès— est associé à plusieurs problèmes de santé, incluant les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2, l’obésité tant chez les adultes que les enfants, l’hypertension, et la mortalité en général. Reste maintenant à définir ce qu’est une courte nuit.
Car des études indiquent qu’il n’y a pas de quantité idéale de sommeil applicable à tous. Celle-ci devrait au contraire être individualisée en fonction de différents facteurs.
Pourquoi 8 heures?
Aux États-Unis, la National Sleep Fondation a établi des durées de sommeil spécifiques à chaque groupe d’âge. Pour les adultes en bonne santé, la durée idéale serait de sept à neuf heures par nuit alors que les personnes de plus de 65 ans auraient besoin de sept à huit heures. Et les adultes qui mettent du temps à s’endormir – plus de 10 à 20 minutes – devraient adapter leur heure de coucher de façon à obtenir réellement huit heures de sommeil.
Toujours aux États-Unis, les Centres de contrôle des maladies recommandent des nuits de sept heures et plus pour les 18 à 60 ans; de sept à neuf heures pour les 61 à 64 ans et de sept à huit heures pour les 65 ans et plus. Quant à l’Organisation mondiale de la santé et à l’American Academy of Sleep Medicine, elles recommandent aux adultes de dormir au moins sept à huit heures par nuit.
Ces lignes directrices présentent donc une plage de temps recommandée pour les personnes en bonne santé et qui ne souffrent pas de troubles du sommeil. Dormir une heure de plus ou de moins que la durée moyenne peut être acceptable en fonction de l’état de santé général, des activités quotidiennes et des habitudes de sommeil typiques.
Au Canada, les statistiques compilées en 2017 indiquaient que les Canadiens de 18 à 64 ans dormaient en moyenne 7,14 heures par nuit et que 65% d’entre eux dormaient suffisamment (sept à neuf heures). Alors que chez les personnes âgées, c’était 7,24 heures par nuit et 54% d’entre elles qui dormaient assez (sept à huit heures).
Effets délétères d’un manque de sommeil
Les personnes qui ont des insomnies ou dorment trop peuvent présenter des symptômes annonciateurs de problèmes de santé graves. Ou, si leurs nuits trop courtes sont le résultat d’un choix délibéré, ces personnes peuvent, sur une période prolongée, compromettre leur santé et leur bien-être, indique la National Sleep Foundation.
Plusieurs études ont montré des effets délétères d’un manque de sommeil. Par exemple, une recherche publiée l’an dernier dans Nature Communications conclut qu’un sommeil de six heures ou moins par nuit, entre 50 et 70 ans, serait associé à un risque de démence plus élevé de 20 à 40 % comparativement à ceux qui ont des nuits de sept heures. Une autre étude publiée en 2017 dans Neurology montre que chaque réduction de 1 % du temps de sommeil paradoxal est associée à une augmentation de 9% du risque de démence, soit un trouble de la mémoire et des fonctions cognitives. Ces travaux suggèrent un lien entre la durée du sommeil et le risque de démence, sans établir toutefois une relation de cause à effet. Ainsi, il est difficile de savoir si les troubles du sommeil surviennent en raison de la démence ou si les mauvaises habitudes de sommeil sont susceptibles de contribuer au développement de la maladie.
Une analyse prospective américaine parue il y a une quinzaine d’années indiquait que de dormir cinq heures ou moins par nuit augmentait de 60 % le risque d’hypertension chez des adultes d’âge moyen. Une méta-analyse publiée en 2011 a conclu que les personnes qui dormaient peu étaient plus à risque de maladie coronarienne et d’AVC que celles qui dormaient de sept à huit heures par nuit. Depuis, plusieurs autres études ont confirmé qu’un sommeil insuffisant est nuisible à la santé cardiovasculaire.
Question d’heure et de régularité
Il n’y a pas que le manque de sommeil, il y a le manque de régularité. Se réveiller ou s’endormir à des heures trop variables augmenterait aussi les risques de problèmes cardiovasculaires, selon une étude publiée en 2020 dans le Journal of the American College of Cardiology. Les personnes dont la différence de durée de sommeil était de deux heures ou plus d’une nuit à l’autre, présentaient un risque deux fois plus élevé de tels problèmes de santé.
L’heure du coucher aurait aussi une influence. Une étude parue en novembre dernier et menée auprès de 88 000 Britanniques âgés de 43 à 79 ans, montre que les personnes qui s’endormaient entre 22 h et 23 h étaient celles qui présentaient le moins de risques de développer une maladie cardiovasculaire. Quand l’heure du coucher était après 23 h, le risque augmentait de 12 % et passé minuit, de 25 %. Étonnamment toutefois, c’est aussi vrai dans l’autre sens: l’étude conclut que les participants qui s’endorment avant 22h ont un risque supérieur de 24% de développer des maladies cardiaques.
Enfin, la durée et la régularité du sommeil ne suffisent pas, la qualité a aussi son importance. Les personnes dont le sommeil est fréquemment interrompu ou écourté peuvent ne pas avoir suffisamment bénéficié des différentes phases de sommeil qui marquent une nuit normale. Un mauvais sommeil peut entraîner de l’irritabilité et de l’anxiété, et augmenter le risque d’hypertension, de cardiopathie, d’obésité et de diabète de type 2.
Verdict
Un adulte en bonne santé devrait dormir entre sept et neuf heures par nuit, soit une moyenne de huit heures pour se maintenir en santé et diminuer le risque, entre autres, de maladies cardiovasculaires. Outre la durée, la régularité et la qualité du sommeil sont aussi à prendre en considération.