La compagnie SpaceX, qui est engagée dans un ambitieux programme de mise en orbite de milliers de satellites, aurait-elle oublié qu’il y a, dans l’espace, des éruptions solaires?
C’est l’impression que donne cette semaine la nouvelle comme quoi 40 des 49 petits satellites lancés le 3 février ont été détruits par un de ces orages magnétiques dont le Soleil a le secret. Ou du moins, détruits indirectement. C’est qu’un orage magnétique provoque une forme de « dilatation » de l’atmosphère terrestre; or, parce que ces satellites sont sur une orbite basse (environ 210 km d’altitude), ils sont plus vulnérables à une telle dilatation. Ils entrent soudain en contact avec davantage de particules formant la couche supérieure de notre atmosphère, ils sont ainsi freinés et « tombent » sur une orbite de plus en plus basse qui les entraîne vers une chute inévitable sur notre planète —certains sont déjà allés se désintégrer dans l’atmosphère.
C’est un risque que connaissent tous les ingénieurs spatiaux et tous les concepteurs de satellites depuis des décennies. Ce qui étonne, c’est que cette tempête solaire a été observée le 29 janvier. Les particules éjectées par le soleil sont arrivées dans le voisinage de la Terre le 2 février, créant ce qu’on appelle une tempête géomagnétique. Or, le lancement des 49 nouveaux satellites a eu lieu le 3 février. N’y a-t-il pas quelqu’un qui aurait dû recommander de retarder le lancement ?
Selon une estimation citée par le New York Times, la perte de ces 40 satellites s’élèverait à 100 millions de dollars, incluant le coût du lancement.
« Je suis sidérée », commente dans le même journal l’astronome de l’Université de Régina, Samantha Lawler. « Ils n’ont pas pensé à ça? » ajoute l’astronome américain Jonathan McDowell, qui recense et suit à la trace les objets artificiels qui tournent autour de notre planète.
En théorie, il aurait été possible d’envoyer une commande aux satellites pour les faire monter vers une orbite plus élevée mais, selon un communiqué émis par Space X, « l’expansion » de l’atmosphère aurait été trop grande.
Le projet Starlink de la compagnie Space X, amorcé en 2019, compte en ce moment 1915 satellites (selon la recension faite par McDowell), de sorte qu’en perdre 40 est un incident « mineur ». Mais dans les faits, ce sont près de 2100 satellites qui ont été lancés, dont près de 200 sont retombés sur Terre depuis, suite à des problèmes techniques. Ce qui signifierait, avec le nouvel incident, un taux de perte de plus de 10%.
Un incident qui provoque déjà des interrogations sur la façon dont est opéré ce réseau de satellites. Sans compter qu’on entre actuellement dans un cycle d’activités solaires accrues, cycle qui devrait atteindre son sommet vers 2025.