Lorsque vient le temps d’adopter des mesures sanitaires pour combattre la pandémie, les gouvernements sont parfois allés jusqu’à choisir une option draconienne: celle d’imposer un confinement. Une équipe de chercheurs, y compris des spécialistes de l’Université de Colombie-Britannique Okanagan (UBC), a créé un modèle visant à aider les dirigeants à justement prendre une décision à ce sujet, si jamais la situation se dégradait à nouveau de façon importante.
Selon la Dre Rebecca Tyson, une professeure en mathématiques à UBC, lorsque la pandémie de COVID-19 a éclaté, plusieurs gouvernements ont immédiatement mis en place des confinements importants pour limiter la dissémination de la maladie.
Cependant, à mesure que la pandémie se poursuivait, les gouvernements ont dû sérieusement s’interroger à propos des coûts associés à l’imposition de nouveaux confinements, ou de la prolongation de ceux déjà en place.
« Notre étude est motivée par l’hésitation démontrée par certains dirigeants quant à l’idée d’imposer des mesures de contrôle strictes pour ralentir la contamination de COVID-19, notamment en raison des coûts gigantesques pour l’économie », indique Mme Tyson. « Pour prendre des décisions de façon éclairée, il est clair que nous devons effectuer une quantification objective des coûts totaux de la crise sanitaire et des mesures de fermeture temporaire de l’économie. Avec ces travaux de recherche, nous présentons un modèle des coûts sanitaires et économiques qui est un outil utile pour évaluer les options en matière de confinement. »
L’équipe de recherche a utilisé des dollars canadiens pour calculer les coûts économiques d’un confinement, tel que mesuré par la diminution du produit intérieur brut (PIB), tout en incluant les dépenses liées au traitement médical des personnes infectées, et la valeur des vies perdues.
« L’un des problèmes est qu’il existe des « coûts en dollars », comme la baisse du PIB et les coûts médicaux », mentionne la Dre Tyson. « Et ensuite, il y a les coûts liés aux décès, qui sont beaucoup plus difficiles à calculer. »
Pour séparer ces coûts particulièrement différents, et impossibles à comparer, la Dre Tyson a utilisé un outil d’optimisation appelé front Pareto, qui a permis à l’équipe de recherche de décider comment donner une valeur aux vies perdues, sans s’en tenir à un coût statistique précalculé.
Le résultat est une courbe qui démontre une baisse rapide des décès lors de la mise en place d’un confinement, suivi d’une diminution beaucoup plus lente du nombre de morts à mesure que les niveaux de confinement augmentent fortement.
« Il faut atteindre un équilibre entre le fait de sauver des vies et les coûts économiques du confinement », mentionne la Dre Tyson. « Notre recherche présente un modèle simple, avec du contenu économique et épidémiologique, pour aider à évaluer les options. De façon plus précise, nous voulions déterminer quel type de stratégie de confinement permet de minimiser les coûts pendant l’ensemble de la pandémie. »
Un autre point de vue sur les confinements
De l’avis de la chercheuse, l’étude présente une perspective intéressante sur les mesures de confinement utilisées par le gouvernement britanno-colombien et par d’autres gouvernements. Dans presque tous les cas, après un confinement sévère, au début, les économies ont été rouvertes. On espérait ainsi contrôler le taux de transmission du virus à l’aide du suivi des contacts, combiné à des mesures de prévention comme le port du masque, le lavage des mains, le fait d’éviter les rassemblements et demander aux clients de garder une distance de deux mètres.
Cependant, ces mesures de prévention n’ont pas été aussi efficaces qu’espéré, et à l’approche de chaque vague, le nombre de cas a augmenté et les gouvernements ont commencé à remettre en place des mesures de confinement importantes.
L’analyse laisse entendre que les gouvernements provinciaux et fédéraux ont fait preuve de sagesse lorsqu’ils ont imposé des confinements stricts au début de la pandémie. Mais peut-être qu’une réouverture plus graduelle aurait mené à un coût économique moins important.
« Si notre modèle n’est aucunement une représentation complète de tous les coûts et avantages des mesures sanitaires, il regroupe les principaux aspects du système, et les tendances qui se dégagent dans nos résultats reflètent des dynamiques réelles. Les décideurs doivent trouver un équilibre entre plusieurs demandes qui s’opposent, et qui sont tout aussi importantes, lorsque vient le temps de concevoir des politiques publiques, et il est donc critique que les élus aient accès à des études scientifiques qui offrent un regard d’ensemble. »
La Dre Tyson espère que les travaux seront non seulement utiles contre la COVID-19, mais aussi lors de futures pandémies.