Quel étrange album que ce Visions, le plus récent album du groupe rock américain Red Vox. Emmenée, comme toujours, par le guitariste et chanteur Vinny, la formation propose ici une dizaine de pistes aux accents parfois frondeurs, parfois mélancoliques, qui, s’ils sont moins rageurs, ou encore résignés que dans le cadre de Realign, le précédent album complet, sont toutefois suffisamment solides pour que le voyage musical en vaille la chandelle.
« There’s a will left to survive / And a lot more on my mind that isn’t ordinary », entend-on sur Middle of the Street, la deuxième piste de l’album. Difficile de ne pas penser à la crise dans laquelle nous sommes tous englués depuis deux ans. Difficile, aussi, de ne pas imaginer Vinny et ses collègues tenter de combattre leur spleen pandémique en créant de la nouvelle musique, idéalement pas trop mélancolique.
Bien entendu, les thèmes sont déjà relativement connus. Après tout, n’est pas King Gizzard and the Lizard Wizard qui veut, et le style des gars de Red Vox demeure similaire d’album en album. Cela ne veut toutefois pas dire que Visions ressemble à tous les autres: on sent bel et bien quelque chose comme une hargne, si l’on veut. Ou est-ce plutôt de la détermination? Une volonté de se battre, de s’accrocher?
Écouter du Red Vox, c’est aussi se laisser bercer par un rock doucement psychédélique aux guitares chaudes. C’est un peu, en fait, comme si quelqu’un avait transposé les rayons légèrement troubles d’un après-midi ensoleillé sous la forme de notes de musique. Le tout est chaud, presque enveloppant… avec un petit côté tripatif. Peut-être l’équivalent des particules de poussière qui scintillent en voletant dans les airs?
La métaphore a peut-être dépassé les limites de son utilité, mais Visions est un excellent exemple d’un groupe qui poursuit son exploration musicale, sans nécessairement dépasser des frontières imaginaires – et sonores. Si ça marche, pourquoi pas?
Bref, Visions, c’est un peu une portion supplémentaire de Red Vox sans trop se casser la tête. Pas aussi exploratoire et contemplatif que Realign, heureusement pas aussi terre à terre que Blood Bagel, cet album pourrait potentiellement faire penser à Another Light, en quelque sorte. Pas mal du tout, en fin de compte.
En fait, on pourrait quasiment avancer que Red Vox est l’équivalent « années 2010 » et « 2020 » des Dandy Warhols. Une proposition un peu tordue, sans doute, mais qui se vaut, surtout en considérant qu’à l’instar des Dandys, les gars de Red Vox pourraient bien avoir produit leur meilleur matériel durant leurs premières années. Espérons tout de même que cela ne sera pas le cas.