Pour certains, le temps des Fêtes rime avec alcool et tous les moyens sont bons pour éviter la gueule de bois. S’abstenir de mélanger les alcools serait-il un de ces moyens?
Il faut tout d’abord rappeler que c’est la quantité totale d’alcool ingurgitée qui est le meilleur prédicteur de l’intensité de la gueule de bois.
L’impression qu’un mélange fait une différence peut toutefois venir de deux choses: d’une part, la consommation d’une variété de boissons alcoolisées amène généralement les fêtards à mal évaluer la quantité totale d’alcool consommée, et à sous-estimer leur niveau d’intoxication. D’autre part, tous les alcools n’agissent pas avec la même intensité.
Ces substances appelées congénères
En effet, pour une même quantité d’alcool, certains choix se révèlent meilleurs que d’autres pour diminuer les symptômes désagréables au réveil. Une étude parue en 2010 avait par exemple comparé les effets du bourbon et de la vodka pour savoir lequel, de ces deux alcools forts, provoquait la gueule de bois la plus intense. Près de 100 jeunes adultes s’étaient prêtés au jeu. Résultat : ceux qui avaient consommé du bourbon avaient des symptômes plus sévères au réveil que ceux à qui on avait servi de la vodka.
Les congénères —des substances autres que le type d’alcool souhaité— en seraient responsables. Ces sous-produits issus du processus de fermentation, comme le méthanol, l’acétone et l’acétaldéhyde, de même que certains tanins, peuvent avoir des effets toxiques et influencer aussi le rythme de dégradation de l’alcool. La fermentation en baril donne sa couleur foncée aux boissons, mais elle introduit du même coup certains de ces composés organiques dans la bouteille. Généralement, les alcools foncés ont donc une teneur plus élevée en congénères que les alcools plus pâles. Le bourbon contient 37 fois plus de ces molécules que la vodka.
En théorie, c’est pourtant à l’éthanol qu’on devrait imputer la responsabilité de la gueule de bois, puisqu’on retrouve cette molécule dans tous les alcools. Mais l’hypothèse la plus répandue veut que ce soit par l’ajout des congénères que les maux de tête et la nausée gagnent en intensité. Par exemple, le méthanol est métabolisé de la même façon que l’éthanol, mais les enzymes préfèrent dégrader l’éthanol en premier. Résultat, le méthanol patiente dans l’organisme et prolonge les effets du verre d’alcool.
Cette hypothèse n’explique toutefois pas tout. Dès 2008, une recherche aux États-Unis avait suggéré que certains des buveurs semblaient « résistants » à la gueule de bois, peu importe le type d’alcool —on évoquait notamment l’interaction avec les tissus du tube digestif, qui peut varier d’une personne à l’autre, ou le taux de sucre dans le sang. Une étude danoise menée auprès d’une centaine de jeunes adultes a conclu que trois sur 10 n’avaient pas de gueule de bois, même après « plus de 12 verres ».
Reste que sur la liste noire, figurent généralement le vin rouge et le brandy, jugés responsables des lendemains de veille les plus puissants. À l’inverse, une soirée à consommer du vin blanc et de la vodka générerait moins de symptômes au réveil.
Quant à savoir dans quel ordre il est préférable de boire, la logique, indépendamment du rôle des congénères, est de commencer par les plus faibles en alcool —par exemple, la bière— et de migrer progressivement vers l’alcool fort, comme la vodka ou le rhum. L’intoxication se fait plus lentement et le jugement est donc moins rapidement altéré.
Verdict
Ce n’est pas le mélange d’alcools qui rend le lendemain de veille plus intense, mais bien les types d’alcools et surtout, la quantité totale ingérée. Tant qu’à consommer plusieurs boissons alcoolisées différentes dans une même soirée, vaudrait mieux, par prudence, choisir des boissons faibles en congénères.