« Érosion de la cohésion sociale », « crises liées aux revenus et modes de vie », « détérioration de la santé mentale »: voilà quelques risques envisagés pour l’année 2022, selon un grand sondage effectué par le Forum économique mondial. À cela, il faut également ajouter les peurs découlant de la multiplication des impacts de la crise climatique et l’agrandissement du fossé entre les pays riches et les autres, qui sont laissés derrière, après avoir été durement touchés par la pandémie, notamment.
Dans le cadre de ce grand exercice international, les experts de l’organisation affirment « qu’une reprise économique divergente à la suite de la crise créée par la pandémie risque d’empirer les divisions mondiales, à un moment où les sociétés et la communauté internationale doivent urgemment collaborer pour combattre la COVID-19, guérir les blessures et s’attaquer à la multiplication des risques internationaux ».
Devant tous les obstacles qui semblent se dresser devant l’humanité, à peine 16% des répondants disent avoir une vision « optimiste et positive à propos de l’avenir du monde », alors que 11% croient que la reprise économique va s’accélérer. La plupart des répondants, lit-on dans le rapport publié cette semaine, estiment plutôt que les trois prochaines années seront caractérisées par une volatilité constante et de multiples surprises, ou encore par des trajectoires fracturées qui sépareront les « gagnants » des « perdants ».
Tout cela prend cependant un pas de recul devant les enjeux environnementaux, alors que les « événements climatiques extrêmes », « l’incapacité de combattre les changements climatiques » et la « perte de biodiversité » sont considérés comme les trois plus importantes menaces des 10 prochaines années. Elles rejoignent ainsi les « crises de l’endettement » et les « confrontations géoéconomiques » dans la liste des risques perçus comme étant les plus concrets.
« Les changements climatiques se manifestent déjà sous la forme de sécheresses, d’incendies, d’inondations, de raréfaction des ressources et de disparition des espèces, entre autres impacts », rapportent les auteurs du rapport. Ces mêmes auteurs mettent en garde contre une transition désordonnée vers des économies et des sociétés plus vertes, ce qui pourrait accroître les lignes de fracture entre pays et nuire au résultat final.
Pire encore, il n’y a pas de solution facile, lit-on dans le document. Car après tout, si des pays aux industries fortement consommatrices de combustibles fossiles ne font pas le saut vers des solutions meilleures pour l’environnement, elles risquent de perdre leurs avantages concurrentiels, notamment en raison de la multiplication des « bourses du carbone » ou autres taxes du même acabit, du désinvestissement dans le pétrole et le charbon, etc.
D’un autre côté, abandonner les énergies fossiles pourrait vouloir dire menacer des dizaines, ou peut-être des centaines de milliers d’emplois, ce qui entraînera une volatilité économique bien malvenue après les crises associées à la pandémie. Sans compter les impacts politiques potentiels. « Une transition qui ne tient pas compte des implications sociales viendra exacerber les inégalités au sein des pays et entre les nations, ce qui augmentera les frictions géopolitiques », avancent les auteurs du coup de sonde.
Les migrations, un problème du 21e siècle
Poussés par les guerres, les catastrophes ou par les problèmes économiques, ce sont des dizaines de millions de personnes qui décideront d’émigrer, au cours des prochaines années, un autre problème défini comme étant une « migration involontaire » par les participants au sondage international du Forum économique mondial.
En 2020, les seules guerres ravageant la planète ont jeté 34 millions de personnes sur les routes, un record.
Dans plusieurs pays, toutefois, les impacts à long terme de la pandémie, avec un possible protectionnisme économique à la clé pour assurer que la relance profite aux populations nationales, notamment, pourraient entraîner une multiplication des barrières pour les immigrants potentiels.
À l’autre extrémité du spectre, jamais autant de postes n’auront été vacants en Occident; aux États-Unis, ce sont 11 millions d’emplois qui n’ont pas trouvé preneur, et plusieurs millions de travailleurs démissionnent, chaque mois, convaincus qu’ils peuvent trouver mieux ailleurs. Dans l’Union européenne, il manquerait 400 000 conducteurs dans la seule industrie du transport, vitale pour assurer le fonctionnement de chaînes d’approvisionnement mises à mal par les dérèglements imputables à la COVID-19.
Toujours selon les auteurs du rapport, devant les barrières à l’immigration, les populations désespérées n’auront d’autre choix que de tenter la traversée de la Méditerranée, par exemple, ce qui fera augmenter le bilan humain de cette crise.
À travers tout cela, le Forum économique mondial envisage, à l’instar des Nations unies, une hausse de la pauvreté extrême. Selon les experts consultés, 51 millions de personnes en plus vivront dans le dénuement le plus total en 2022 et au cours des prochaines années.