La crainte, ou, du moins, une certaine inquiétude est généralement de mise, lorsqu’il est question d’adapter un produit culturel en une autre déclinaison; l’adage est encore plus vrai du côté des jeux vidéo, où les transpositions de la console (ou de l’ordinateur) vers le petit ou le grand écran, ou encore les livres, etc., se soldent généralement au mieux par quelque chose de passable, au pire par des navets insondables. Heureusement, Arcane échappe à cette malédiction.
Produite par Riot Games et Fortiche Production, Arcane est une série d’animation qui s’appuie sur l’univers de League of Legends, l’un des jeux les plus populaires qui soient, surtout du côté des titres multijoueurs.
Ce titre est d’ailleurs le produit phare de Riot depuis son lancement, en 2009. À un point tel, en fait, qu’il existe tout un monde de compétitions entourant LoL, de son petit nom, avec des tournois endiablés où la foule est bien souvent en délire.
Pour des non-initiés, cependant, tout cela a des allures de charabia incompréhensible. L’annonce d’une série télé basée sur cet univers laissait donc présager une oeuvre ennuyante, dégoulinante de fan service, d’une qualité minimale (pour simplement maximiser le retour sur investissement), ou encore un mélange des trois.
Pourtant, les neuf épisodes de cette première saison, qui est disponible sur Netflix, font fort aisément mentir les mauvaises langues.
Dans un monde tenant de quelque chose ressemblant à du steampunk, ou encore du Victorian punk, sorte de monde s’appuyant sur l’esthétique de l’époque victorienne, mais fonctionnant, en partie, selon des technologies beaucoup plus avancées, la ville de Piltover est un phare de modernisme et de richesse. À un point tel, en fait, que ses dirigeants se sont eux-mêmes attribué le surnom de « ville du progrès ». Pourtant, dans la partie la plus pauvre, surnommée Zaun par certains de ses habitants sans le sou, la misère est largement répandue et la colère gronde.
Entrent en scène alors trois personnages principaux, soit Jayce, un jeune inventeur fougueux qui souhaite percer le mystère de certaines sources d’énergie pour en exploiter le potentiel, et Vi et Powder, deux soeurs orphelines qui doivent cumuler vols à la tire et autres larcins pour s’en sortir. C’est justement lors d’un cambriolage plus audacieux qu’elles finissent dans l’atelier de Jayce, et qu’elles mettront en branle une profonde transformation de l’équilibre des forces économiques, politiques et sociales de Piltover (et de son côté plus sombre).
L’affaire est (en partie) déjà connue: les riches oppriment les pauvres, le crime et la corruption gangrènent, à des degrés divers, les deux pans de la société, et une puissante drogue fait des ravages chez les plus miséreux. Au milieu de tout cela, des puissants de part et d’autre tentent de maintenir la paix. Ou, du moins, de s’en mettre plein les poches avant que la révolte n’éclate.
La structure scénaristique est classique, oui, mais c’est ce côté plus fantastique, avec ces pouvoirs quasiment magiques, notamment, qui font d’Arcane une oeuvre unique. Il faut dire, aussi, que l’animation et le jeux des acteurs y sont pour beaucoup dans la qualité de la production. Avec des visuels évoquant à la fois le style de l’excellente série Dishonored, et le plus que génial film Spider-Man: Into the Spider-Verse, la série est rafraîchissante, audacieuse, surprenante… bref, on est étonnés par la grande qualité de cette production, et par le naturel des mouvements des personnages, notamment, qui s’accordent sans heurt avec les dialogues complets et complexes.
Bien sûr, Arcane n’est pas une grande réflexion sociopolitique et économique à propos d’une structure gouvernementale qui favorise l’exploitation des moins bien nantis. Enfin, un peu, certes, mais c’est avant tout une série d’action. Et plus spécialement, une série d’action destinée aux adolescents, avec certains détours scénaristiques ou encore accompagnements musicaux qui correspondent peut-être davantage à ces jeunes publics.
Cela étant dit, Arcane n’est aucunement une série pour les jeunes enfants, que ce soit par les thèmes qu’elle aborde, ou encore par la violence qui y est montrée. De fait, Riot Games semble avoir aisément évité les écueils de l’adaptation de jeux vidéo vers un autre médium, et on attend avec impatience la deuxième saison de cette série qui promet.