Depuis deux semaines, déjà, et jusqu’au 9 janvier prochain, le Centre d’art Diane-Dufresne, à Repentigny, accueille deux créateurs visuels dont le nom de famille est bien connu dans le milieu artistique, mais aussi, plus largement, au sein de la société québécoise. Et pour le plus jeune des deux, c’est l’occasion de tisser des liens encore plus étroits avec son père, mais aussi de s’établir davantage comme artiste indépendant. Entrevue.
« Qu’est-ce que ça fait, d’exposer avec mon père? Eh bien, c’est le fun« , lance tout de go Alexis Vaillancourt, fils d’Armand Vaillancourt, dont la réputation n’est plus à faire.
« Nous nous étions approchés à plusieurs reprises pour des projets communs, Armand et moi, et je dirais que nous sommes assez indépendants, chacun de notre bord. Je suis un peu les traces de mon père, mais d’un autre côté, je n’ai pas envie de faire mon nom juste en tant que « le fils de ». Alors, c’est sûr que ce n’est pas toujours de bonnes occasions pour faire des projets connexes. Et pour cette exposition-ci, la façon dont nous avons été approchés par le Centre d’art est intéressante. On nous a clairement indiqué que nous étions deux artistes distincts, l’invitation était intéressante, puisqu’on ne voulait pas simplement « l’expo père-fils », ou « l’expo de famille ». Cela a fait en sorte que ça nous tentait davantage de monter cette exposition-là. »
« Je suis évidemment super content d’exposer avec mon père », poursuit M. Vaillancourt. « C’est aussi quelque chose qui nous permet de se voir, de se parler, ce qui est toujours agréable. Je sais aussi que ce n’est pas donné à tout le monde, et que c’est donc une grande chance de pouvoir réaliser un projet de ce genre avec son père. »
L’idée de cette exposition remonte déjà à un certain temps. Comme un nombre presque incalculable d’autres événements, celui-ci a été reporté en raison de la pandémie. « Cela nous trottait quand même dans la tête depuis longtemps », indique encore M. Vaillancourt.
Mais quand est venu le temps de choisir les oeuvres à exposer, le plus jeune des deux artistes s’est plutôt tourné vers sa mère pour obtenir un avis externe. « Mon père est tombé malade dans les deux mois du montage de l’exposition, et n’a donc pas concrètement participé. On lui en parlait, et il approuvait nos décisions, mais les choses se sont beaucoup déroulées avec ma mère. Ce qui était intéressant, c’est que nous avons été approchés comme deux artistes distincts; nous voulions aussi garder le tout actuel, surtout qu’Armand est encore extrêmement actif dans plusieurs sphères, notamment la sphère artistique », mentionne M. Vaillancourt.
« Il a de nouvelles créations constamment… Et comme je suis plus jeune, et que je suis moi aussi en pleine création, pour créer un lien plus fort, et plus intéressant, on a voulu présenter (une exposition) qui n’était pas simplement à propos du côté familial. »
Créer… toujours créer
Résultat: Alexis, mais aussi Armand Vaillancourt, présentent tous deux des oeuvres contemporaines. Car oui, l’homme de 92 ans continue lui aussi à créer.
« Il y a un gros amour de la matière qui m’a été transmis par lui, et que j’alimente depuis plusieurs années déjà. C’est aussi un lien fort avec la nature, ce qu’on peut accomplir avec elle, et les matériaux qui en ressortent. Tout ce côté de la matière, ce côté architectural, c’est un lien important entre nos oeuvres, dans le cadre de l’exposition. Il y a beaucoup d’oeuvres, comme des tableaux, qui sont dans le geste, en action… C’est davantage un geste qui est présenté qu’une finalité figurative. »
Et pourquoi Repentigny? « Ce sont eux qui nous ont approchés… Et cette approche était intéressante; je sais qu’Armand y était allé quelques fois. C’est un bel espace, la salle est moderne et intéressante. C’est un grand rectangle qui est facile à modeler, c’est assez vierge, comme espace, avec peu de contraintes », mentionne Alexis Vaillancourt, qui reconnaît qu’il « ne connaissait pas cette salle, à la base ».
« Cela donne envie, par contre, de faire le tour des centres et des musées en dehors de Montréal; je le fais un peu, des fois, mais je n’en ai pas toujours l’occasion. C’est agréable de voir qu’il y a des gens qui poussent pour la culture. Je suis convaincu qu’il n’y a pas juste Montréal et les autres grosses villes, dans la vie! », lance encore l’artiste, avant d’éclater de rire.
De l’exposition, M. Vaillancourt dit avoir reçu plusieurs bons commentaires. « J’aimerais avoir plus de réactions négatives », dit-il, là encore avec ce qu’on devine être un sourire aux lèvres. « Nous avons eu de vraiment beaux retours. Ainsi qu’une belle couverture médiatique, ce qui me surprend. Je suis encore en train d’apprendre, de ce côté-là. Je pense que les gens apprécient beaucoup, d’autant plus que je crois que nous offrons quelque chose de différent de ce qui a été proposé précédemment. Surtout que plusieurs oeuvres d’Armand sont très actuelles, et qui n’avaient pas encore été présentées. On connaît beaucoup Armand comme la personne engagée, qui aime crier, mais souvent, ses oeuvres, sa sculpture, sa peinture, sont un peu reléguées à l’arrière. Je trouvais important de montrer que c’est d’abord un excellent artiste. »