À travers le monde, les lacs en général semblent se réchauffer plus vite que prévu, et au cœur du continent nord-américain, les Grands Lacs figurent en tête du peloton.
Les lacs de l’hémisphère nord se sont réchauffés six fois plus vite au cours des 25 dernières années qu’au cours des périodes précédentes du dernier siècle. Cela représente une moyenne de 0,34 degré Celsius par décennie. Et à lui seul, le lac Supérieur — le plus grand et le plus au nord des Grands Lacs — s’est réchauffé trois fois plus que cette moyenne.
Ces données proviennent d’une étude canado-américaine parue en septembre et portant sur 60 lacs de l’hémisphère nord, dont quelques-uns en Ontario. Comme pour la confirmer, les températures de chacun des cinq Grands Lacs ont atteint cet automne des records pour ces mois de fin d’année, de 2 à 3 degrés au-dessus de la normale. L’été avait aussi été marqué par des températures anormalement élevées. Un travail antérieur de certains des mêmes chercheurs, basé sur des données satellites et portant sur une période plus courte, était arrivé en 2015 à des résultats similaires.
L’étude de septembre conclut par ailleurs que les lacs de l’hémisphère ont perdu, en moyenne, 17 jours de couverture de glace depuis un siècle: ils gèlent environ 11 jours plus tard et dégèlent environ une semaine plus tôt. À lui seul, le lac Supérieur a perdu deux mois de glaces depuis un siècle et demi. Si la tendance se maintient, commente dans le Washington Post Dave Richardson, co-auteur de l’étude et professeur à l’Université d’État de New York, « dans les 75 prochaines années, nous allons perdre au moins 106 jours de glace » à travers les lacs des États-Unis.
À cette vitesse, selon les chercheurs, le lac Supérieur et le lac Michigan pourraient ne plus geler du tout en hiver après 2060.
Rappelons que les lacs sont une des principales sources d’eau douce dans le monde. Moins de glace signifie que davantage d’eau s’évapore au printemps, ce qui réduit la quantité d’eau douce disponible pour les humains. Les Grands Lacs sont à eux seuls un réservoir d’eau potable pour 30 millions de personnes. Et c’est sans oublier la diminution de l’eau douce dont ont aussi besoin les poissons et les plantes marines de l’endroit. Enfin, un lac qui se réchauffe plus tôt offre plus d’opportunités de croissance aux algues.
Les données utilisées pour cette recherche proviennent de lacs pour lesquels des gens ont effectué des relevés constants de la couverture de glace, chaque hiver, depuis 100 à 200 ans. Dans un cas, les relevés remontent à l’an 1443: au bord du lac Suwa, au Japon, des prêtres shintô notent fidèlement les jours où le lac gèle et dégèle: une légende locale veut que les dieux mâles et femelles vivent sur les rives opposées et ne peuvent se rejoindre que lorsque le lac peut être traversé à pied.