Plusieurs rumeurs ont circulé à propos des effets qu’aurait le vaccin sur la fertilité humaine. Ces rumeurs sont fausses. Mais qu’en est-il des effets du virus lui-même sur la fertilité? Le Détecteur de rumeurs a vérifié.
L’origine des rumeurs
Dès le début de la campagne de vaccination, les rumeurs à l’effet que les vaccins rendraient stériles ou réduiraient la fertilité ont beaucoup circulé chez les personnes hésitantes face à la vaccination. Selon des chercheurs de Miami et de l’Oklahoma, les recherches à ce sujet sur Internet ont augmenté immédiatement après l’autorisation d’urgence du vaccin aux États-Unis, en décembre 2020.
Dans les faits, résumait entre autres, en février dernier, un avis publié par un groupe d’experts britanniques, ou un communiqué de l’INSERM, en France, en juillet, ou une page du CDC, aux États-Unis, en août, il n’y a aucune donnée qui soutienne l’idée que les vaccins contre la COVID-19 pourraient perturber la fertilité. Ni même aucune théorie qui pourrait expliquer comment le vaccin pourrait avoir un tel effet.
Il faut aussi se rappeler que plusieurs femmes sont tombées enceintes pendant les essais cliniques des vaccins. Or, dès les premiers mois de la campagne de vaccination, les données disponibles n’indiquaient aucune augmentation du risque d’avortements spontanés.
Mais ces rumeurs pourraient aussi avoir pour origine le fait que la maladie, elle, semble bel et bien poser un risque.
COVID-19 et fertilité masculine
Dans une recherche parue en novembre 2020, une équipe de l’Université de Miami dirigée par l’urologue Ranjith Ramasamy, relatait l’autopsie de six hommes décédés de la COVID-19.
Les chercheurs avaient observé une diminution du nombre de spermatozoïdes dans la moitié des cas. Le virus avait également été détecté dans les testicules d’un des sujets. De plus, une biopsie réalisée sur les testicules d’un survivant de la maladie, trois mois après sa guérison, avait montré la présence du virus. Enfin, lors d’une chirurgie visant à installer un implant dans le pénis de deux hommes souffrant de dysfonction érectile, l’analyse des tissus a aussi révélé des traces du virus neuf mois après l’infection.
« Les scientifiques savent que d’autres virus envahissent les testicules et affectent la production du sperme et la fertilité », écrivait Ranjith Ramasamy quelques mois plus tard dans un texte du site interuniversitaire The Conversation.
Lorsqu’un homme est infecté par le virus de la COVID-19, la réponse inflammatoire qui s’ensuit perturbe la barrière sang-testicule, permettant au virus d’atteindre le système reproducteur, résumait le biologiste Robert John Aitken dans une lettre à la revue Andrology parue en août dernier. Le virus peut alors pénétrer dans les cellules grâce à son récepteur, la protéine ACE-2. Cette protéine serait exprimée non seulement dans les voies respiratoires, mais également dans les testicules, en particulier dans les cellules de Leydig produisant la testostérone, selon le résumé des six autopsies publié en 2020. Les patients touchés par la COVID-19 auraient d’ailleurs des taux plus bas de cette hormone, selon Aitken.
Ce dernier ajoutait à cela que plusieurs études ont observé, à la suite de la COVID-19, une diminution de la qualité du sperme de même que des dommages à l’ADN des spermatozoïdes. Les scientifiques ignorent toutefois si ces effets sont dus au virus lui-même ou au stress oxydatif qui est provoqué par la tempête de cytokines — une réaction inflammatoire inquiétante — observée chez les malades.
Enfin, dans une étude parue en mars, une équipe de chercheurs italiens concluait que les hommes infectés par la COVID-19 avaient un risque près de six fois plus élevé de connaître des problèmes d’érection.
COVID-19 et ovaires
Selon des chercheurs indiens, la molécule ACE-2 est également exprimée en grande quantité dans les ovaires. Il serait donc possible que le virus de la COVID-19 attaque ces organes. Peu d’études ayant été réalisées à ce sujet, il s’agit encore d’un risque théorique. Cependant, des scientifiques israéliens ont conclu en septembre que ni l’infection par la COVID-19, ni la vaccination, n’avaient d’effets négatifs sur le fonctionnement des follicules ovariens.
COVID-19 et cycle menstruel
Une chercheuse chinoise a étudié en 2020 les effets de la COVID-19 sur le cycle menstruel. Dans ses analyses, elle a observé un dérèglement menstruel chez une femme sur cinq qui avait connu des symptômes très sévères de la COVID-19. Les règles revenaient à la normale un à deux mois plus tard. Elle n’a pas noté de changement au niveau des hormones sexuelles ou de la réserve ovarienne.
Toutefois, le lien avec le virus n’est pas établi: la chercheuse note que les effets observés sur le cycle menstruel pourraient s’expliquer par le grand stress vécu par les malades. Dans une telle situation, il est courant que les ovaires cessent de fonctionner temporairement.
COVID-19 et grossesse
Il est également possible que la COVID-19 comporte un risque pour la grossesse. Une vaste étude publiée en avril, qui portait sur 2130 femmes enceintes dans 18 pays, concluait que les mères infectées par le virus risqueraient davantage de souffrir de prééclampsie, d’être admises aux soins intensifs ou même, de mourir de la maladie. L’infection aurait aussi augmenté le taux de naissances prématurées. Mais considérant le faible laps de temps écoulé depuis le début de la pandémie, les études à ce sujet sont encore rares et d’autres sont attendues.
Verdict
Aucun lien entre le vaccin et la stérilité. Mais le virus de la COVID-19, lui, pourrait être associé à des problèmes de fertilité, en particulier chez les hommes. Chez les femmes, les répercussions sur le système reproducteur semblent moindres, mais il reste à investiguer l’impact qu’aurait le virus sur le déroulement de la grossesse.