Une nouvelle étude réalisée à Queen Mary University of London, au Royaume-Uni, souligne l’ampleur de la détresse provoquée par le fait d’être coupé des biens numériques lorsque des proches meurent ou deviennent inaptes.
Des biens comme des comptes sur les médias sociaux, des photos et des courriels sont devenus partie intégrante de la planification testamentaire au cours des dernières années. Un sondage effectué auprès de 500 conseillers en matière d’héritage et de succession a révélé que près de 60% d’entre eux ont dû répondre à des questions, de la part de leurs clients, à propos des biens numériques, et 90% s’attendent à ce que cette proportion augmente à l’avenir.
Ces clients posaient principalement des questions à propos des médias sociaux, des courriels, des cryptomonnaies, ainsi que du stockage infonuagique. Les cinq principaux fournisseurs de services numériques mentionnés par des clients, à propos des biens numériques stockés en ligne, étaient Apple, Google, Facebook, Microsoft et Dropbox.
Le coup de sonde indique aussi que près du quart des répondants ont eu des clients qui ont vécu des difficultés lorsqu’est venu le temps d’accéder aux biens numériques d’un proche, ce qui a provoqué beaucoup d’angoisse et de stress, dans de nombreux cas. Le problème, disent les chercheurs et les participants à l’étude, est aggravé par le fait qu’il existe une zone juridique grise lorsqu’il est question des droits de propriété.
Un participant sur cinq a aussi fait état de l’attitude non coopérative des fournisseurs de services dans des cas où il n’était pas possible d’accéder aux comptes.
Au dire des auteurs de l’étude, les législateurs doivent mettre en place des règles beaucoup plus claires en matière de droits de propriété et de droits d’accès par des représentants. Ces mêmes auteurs réclament également que les fournisseurs de stockage en ligne s’assoient avec les planificateurs testamentaires pour trouver les solutions les plus efficaces pour accéder aux comptes à la suite d’un décès, et ainsi permettre à la famille d’obtenir la paix d’esprit.
Seuls 6% des exécuteurs testamentaires jugent qu’il existe un processus clair et direct pour accéder aux biens numériques stockés en ligne, au sein de leur juridiction. Plus de 85% d’entre eux ont affirmé que les fournisseurs de stockage devraient offrir de meilleures solutions pour gérer l’accès à ces biens numériques en cas de mort ou d’accident grave. Cela démontre non seulement la nécessité d’une réforme juridique, mais aussi de la coopération avec les fournisseurs de stockage infonuagique pour trouver des solutions pratiques, écrivent encore les auteurs.
Selon Dave Michels, du Cloud Legal Project à la Queen Mary University of London, « les biens numériques peuvent avoir une grande importance sentimentale; il est donc important que les gens puissent obtenir une certitude juridique à propos de ce qu’ils peuvent transmettre après leur décès. Je sais que ma femme aimerait avoir accès aux photos de famille stockées sur mon compte iCloud, après ma mort ».
Le professeur Christopher Millard, participant lui aussi au projet, indique que « la Law Commission d’Angleterre et du Pays de Galles examine présentement le statut de propriété des biens numériques en vertu du droit britannique. Nous attendons leurs recommandations, et nous espérons qu’elles permettront de s’attaquer aux besoins urgents en matière de modernisation des lois sur la succession, pour le 21e siècle ».
Emily Deane TEP, avocate au sein de STEP, un regroupement de conseillers testamentaires, mentionne « qu’en quelques années seulement, les biens numériques sont devenus essentiels à plusieurs aspects de nos vies. Des objets sentimentaux, comme les photos et les contenus publiés sur les médias sociaux, aux informations personnelles comme les courriels confidentiels, les mots de passe et les dossiers médicaux, ces biens sont maintenant tout aussi importants, dans nos vies, que les biens traditionnels ».