Le vent est-il en train de tourner au pays de la liberté d’expression? Une récente enquête du Pew Research Center évoque le fait que près de la moitié des Américains sont maintenant d’avis que le gouvernement fédéral devrait « poser des gestes » pour combattre le fléau des fausses nouvelles en ligne. Une première, mais aussi le résultat d’un profond changement au sein de la population de ce pays.
Profond changement, en effet, puisque si la proportion d’Américains souhaitant une intervention gouvernementale a atteint 48%, cette année, le taux n’était que de 39% en 2018, pourtant au plus fort de la présidence de Donald Trump, reconnu notamment pour ses mensonges et sa dissémination de fausses informations sur les réseaux sociaux.
L’enquête, qui a regroupé 11 178 adultes américains, interrogés entre le 20 juillet et le 8 août, indique aussi que 59% des participants souhaitent que les compagnies technologiques, y compris les propriétaires et exploitants des divers réseaux sociaux, agissent eux aussi contre les fausses informations.
Dans ce cas, cependant, la différence avec 2018 est moindre: la croissance n’est que de trois points de pourcentage en l’espace de trois ans. Cela signifie aussi qu’un nombre considérable de personnes, soit entre quatre répondants sur 10 (38%), estiment qu’au contraire, la liberté d’expression est primordiale en ligne, même si cela signifie permettre la dissémination de fausses informations.
La question de la liberté d’expression revient très fréquemment, aux États-Unis, en rapport avec les contrôles, parfois plus ou moins concrets, qui ont été ajoutés aux plateformes numériques avec les années. Si la notion de liberté d’expression, telle que mise de l’avant dans la constitution américaine, ne s’applique normalement qu’à ce qui est lié au gouvernement, et non pas au secteur privé, Facebook, Twitter et les autres ont longtemps adopté une politique équivalent à un certain laisser-aller, afin de ne pas, entre autres, perdre une partie de leur clientèle, généralement celle qui est la plus active sur ces mêmes plateformes.
Un sujet particulièrement partisan
Comme bien d’autres enjeux américains, la population est divisée selon ses allégeances politiques. Mais cette fois, le fossé est encore plus grand, puisque le camp républicain a été spécifiquement critiqué pour son utilisation généralement des fausses informations et des fausses nouvelles, y compris en ce qui concerne les résultats de la plus récente élection présidentielle.
Ainsi, 70% des républicains jugent que la liberté d’expression devrait être protégée; la proportion est pratiquement l’exact opposé chez les démocrates, qui estiment à 65% que l’État devrait plutôt agir contre les fausses informations.
Situation similaire lorsque vient le temps de tenir, ou non, les entreprises technologiques responsables de leur laxisme présumé: 76% des démocrates croient que Facebook, Twitter et les autres devraient agir, alors que 61% des républicains s’y opposent. Les deux camps étaient plus près l’un de l’autre en 2018, indique le Pew Research Center, même si les démocrates étaient tout de même plus favorables à une intervention des entreprises.