Une grosse différence entre le rapport du GIEC publié la semaine dernière et son « Résumé pour les décideurs » qui a souvent été cité dans les médias, c’est que le résumé doit être approuvé ligne par ligne par les représentants des gouvernements, au contraire du rapport lui-même. C’est peut-être ce qui explique que les mots « carburants fossiles » n’y figurent pas.
En effet, on chercherait en vain ces mots (fossil fuels) dans les 42 pages du résumé pour les décideurs —pas plus, d’ailleurs, que dans le communiqué de presse du GIEC, comme l’a noté la journaliste Emily Atkin. C’est ainsi qu’on peut lire, dans le résumé, que les activités humaines causent « sans équivoque » les désastres climatiques —mais quelles activités, cela resterait un mystère si on n’avait pour seule source d’information que ce résumé.
Il s’agit là de l’illustration d’un problème qui a maintes fois été signalé dans la dernière décennie à propos des rapports du GIEC: étant donné que peu de gens liront le rapport complet (celui-ci fait 1300 pages) leur partie la plus visible, qui est ce résumé, est marquée par un langage très prudent et très conservateur, parce qu’il doit faire consensus parmi les représentants des différents pays. Y compris les plus gros producteurs de pétrole.
Le rapport, lui, est écrit par les scientifiques —dans ce cas-ci, 234 experts provenant de 66 pays, qui ont synthétisé 14 000 études— sans devoir se plier à des ingérences externes, encore moins à un consensus politique.
Cela étant, un blâme « sans équivoque » adressé aux activités humaines a bel et bien été retenu comme langage dans le résumé pour les décideurs, ce qui constitue une première (It is unequivocal that human influence has warmed the atmosphere, ocean and land). Il s’agirait du plus fort aveu de « culpabilité » en 30 ans d’histoire du GIEC.
Rappelons par ailleurs que ce rapport n’est que le premier d’une série de trois, les deux autres étant attendus pour 2022. Celui-ci porte sur l’état des connaissances sur les changements climatiques, le deuxième portera sur les impacts et l’adaptation, et le troisième sur les moyens d’atténuer les impacts. Il en avait aussi été de même avec les cinq éditions précédentes, et cette division en trois volumes, qui remonte donc aux années 1990, constitue un défi de vulgarisation: difficile de parler dans un premier volume du rôle des carburants fossiles sans parler de la nécessité de réduire les carburants fossiles, qui est pourtant censé être un thème du deuxième volume. Et difficile de parler des impacts, tels que les incendies catastrophiques des derniers mois qui feront partie du deuxième volume, sans parler d’atténuation, thème du troisième volume.