La vie n’est plus ce qu’elle était: sur Terre, planète que l’on imagine dévastée, à bout de souffle, exsangue de ressources, surpeuplée, comme sur Mars, le nouvel espoir qui s’est déjà éteint, l’avenir est bien sombre. Et c’est dans ce contexte que Settlers s’inscrit en faux par rapport à tous les films présentant la colonisation spatiale comme une épopée grandiose rassemblant des gens entreprenants et visionnaires.
Réalisé et scénarisé par Wyatt Rockeller, Settlers, d’abord avec son titre, mais aussi avec son esthétique, notamment le chapeau porté par l’héroïne, qui évoque le bonnet blanc des femmes puritaines arrivées sur le continent nord-américain, s’inspire très largement des récits de colonisation de la Nouvelle-Angleterre, mais aussi, plus largement, de la conquête de l’Ouest.
D’abord, bien entendu, parce que le film a forcément été tourné dans le désert, histoire de bien donner l’impression que l’on se trouve sur la Planète rouge, mais aussi parce que les thèmes sont similaires: là aussi, il y est question de vol de terres, de violence, de survivance à l’aide de maigres ressources, et de travail manuel. Car peu importe le fait que transporter des humains vers Mars représente un exploit scientifique et technologique incroyable, c’est à la sueur de leur front que ces colons tâcheront de tirer une maigre subsistance du sol rocheux. Bien sûr, la technologie a son rôle à jouer, mais dans l’ensemble, il n’est pas nécessaire de parcourir plusieurs dizaines de millions de kilomètres pour élever des cochons, faire pousser des tomates et rafistoler un réservoir d’eau potable pour faire fonctionner un système de plomberie.
Settlers, donc, se déroule sur un nouveau monde où les échecs de l’ancien sont bien présents. « Il y avait des villes, d’autres colonies… Tout cela a disparu », lancera Jerry, un homme taciturne interprété par Ismael Cruz Cordova, dont les parents ont été tués par les parents de Remmy, notre héroïne. C’est d’ailleurs dans le plus pur esprit de cette volonté de survie que s’articulera le scénario et ses quelques rebondissements qui confirmeront une chose: même sur Mars, point de salut pour ceux qui espéraient refaire leur vie en fuyant les problèmes qui gangrènent la lointaine planète mère.
Si l’on ne termine pas nécessairement le visionnement de Settlers en ayant été transformé(e), force est d’admettre que de s’attaquer aux codes du genre de cette manière nécessite un courage que seules semblent pouvoir se permettre les productions indépendantes. Un film à voir, donc, ne serait-ce que pour ce vent de fraîcheur… Une affirmation paradoxale pour un long-métrage se déroulant sur une planète désertique!