Repenser l’extérieur des véhicules lourds, comme les semi-remorques, pour qu’ils soient aérodynamiques sur l’ensemble de leur carrosserie, de façon unie et continue, réduirait le frottement de l’air, améliorerait l’efficacité en matière de kilométrage et diminuerait les émissions polluantes, affirment deux chercheurs du Lawrence Livermore National Laboratory.
En utilisant des mesures effectuées dans des tunnels aérodynamiques et en effectuant des simulations basées sur la dynamique des fluides, les ingénieurs du laboratoire ont démontré que des véhicules intégrant des notions d’aérodynamisme sur l’ensemble de leur carrosserie seraient en mesure de créer d’importantes pressions négatives à l’avant de leurs roues, ce qui aurait pour effet « d’aspirer » les camions vers l’avant, même contre le vent, à l’instar d’un voilier.
Les travaux sont publiés dans Proceedings of the National Academy of Sciences.
Aux États-Unis, rappellent les chercheurs, le transport domestique est dominé par les véhicules lourds, qui s’occupent d’environ 81% de toutes les marchandises (au poids) et près de 86% de toutes les cargaisons si l’on s’intéresse plutôt à la valeur des biens.
Si ces véhicules lourds ne représentent que 4% de tous les véhicules circulant sur des routes, ils sont responsables de plus de 20% de la consommation d’essence liée au transport et des émissions de gaz à effet de serre.
L’une des principales sources d’inefficacité contribuant à leur piètre efficacité énergétique (un peu moins de 40 litres aux 100 kilomètres) est leur effet de frottement dans l’air.
« Les futures améliorations en termes de consommation d’essence et d’émissions polluantes découleront largement de l’amélioration de l’efficacité des véhicules lourds », affirme Kambiz Salari, le principal auteur de l’étude. « Nous avons développé une solution qui transformerait complètement l’industrie du camionnage pour la rendre plus efficace sur le plan énergétique, tout en réduisant les émissions de CO2. »
Les méthodes actuellement employées pour réduire le frottement comprennent l’ajout de plaques à l’arrière de la remorque, des jupettes sur les côtés de celle-ci, ou encore des plaques venant prolonger les côtés et le dessus de la cabine de conduite.
« Cependant, si ces méthodes simples permettent de réduire fortement le frottement, les gains substantiels sont limités par les formes fixes des véhicules lourds contemporains », soutient Jason Ortega, coauteur de l’étude. « Une solution radicale pour contourner ces restrictions consiste à repenser complètement l’extérieur du véhicule lourd, pour qu’il soit intégré, sur le plan aérodynamique, sur l’ensemble de sa longueur, et ne possède donc pas une courtepointe de méthodes supplémentaires. »
S’inspirer des trains
Pour l’équipe d’ingénieurs, la nouvelle forme proposée, qui est similaire à celle d’un train à grande vitesse, permettrait d’obtenir un frottement bien moindre que celui des véhicules lourds contemporains.
Et si une bonne partie de cette réduction du frottement proviendra de l’avant de la cabine, les constructeurs de camions auront à porter attention à l’ensemble des véhicules.
« Pour les futurs designs, il serait nécessaire d’employer des techniques d’optimisation de l’aérodynamisme pour conserver le volume de cargaison au sein de la forme aérodynamique, tout en minimisant le frottement et en s’attaquant à tout problème possible lorsque des vents latéraux toucheront le véhicule », affirme M. Salari.
L’intégration de ces nouvelles méthodes de conception aurait un impact fondamental sur le secteur du fret lourd, qui a consommé plus de 113 milliards de litres d’essence en 2017, et ce seulement aux États-Unis. Chaque point de pourcentage de réduction du frottement entraîne une réduction de 0,45 point de pourcentage de la consommation de carburant pour un véhicule lourd circulant sur l’autoroute.