Si les menstruations rebutent certains, ce n’est pas le cas de l’équipe The Quintessence Quintet. Cinq jeunes filles vêtues de rouge présentaient avec conviction leur application mobile Womensture à la Journée Démo 2021 de Technovation.
Lancé en 2009 dans la Silicon Valley californienne et depuis 2014 à Montréal, cet événement gratuit vise à développer les compétences en technologie et en entrepreneuriat chez les jeunes filles. « Nous voulons éradiquer les tabous qui entourent les menstruations, donner de l’information et permettre aux jeunes filles d’avoir accès à des protections hygiéniques », lance Divita, dont l’équipe de trois pays (Canada, Inde et Nigéria) a décroché un premier prix dans la catégorie Senior.
Ce concours d’entrepreneuriat technologique pour les filles avait réuni de manière virtuelle, le 15 mai, les équipes des antennes de Montréal et de Gatineau/Ottawa. Ces 24 projets, conçus et présentés par des équipes de deux à cinq filles âgées de 10 à 18 ans, proposaient des solutions innovantes à des problèmes d’importance pour la communauté et même la planète —changements climatiques, réduction de notre empreinte écologique, alimentation saine et accessible, etc. Elles devaient aussi élaborer un plan d’affaires et « pitcher » leur projet devant quatre juges.
Ces projets s’inspirent des 17 grands objectifs de développement durable de l’ONU. « Déjà sensibilisées par l’action de Greta Thunberg, ces enjeux les interpellent, tout comme l’actualité avec le gaspillage alimentaire ou la violence domestique », explique la directrice de l’antenne montréalaise de Technovation, Stéphanie Jecrois. « Elles s’intéressent à ces sujets lourds et veulent aider à trouver une solution mais aussi conscientiser les autres jeunes. »
Avec l’arrivée de la Covid-19, l’événement avait migré rapidement sur Internet l’an dernier. Cette année, tout s’est fait par Zoom, y compris les quatre mois de préparation.
Même si cela n’a pas toujours été facile, les équipes s’en sont bien sorties, juge la responsable des mentors, Camille Sénécal. « En personne, les liens et le contact se créent plus vite. Lors des ateliers en ligne, mon conseil aux mentors a été : « suivez le rythme des filles – certaines sont plus compétitives, d’autres juste curieuses de participer, particulièrement les juniors. »
Les mentors bénévoles donnent jusqu’à 50 heures pour fournir la base et propulser les idées sous forme d’application mobile, incluant le plan d’affaires.
Peu de problèmes technologiques et beaucoup d’enthousiasme ponctuaient les présentations le mois dernier. L’équipe SparKL, avec ses conceptrices, Emma et Hyunwoo, s’est particulièrement démarquée, se méritant un coup de cœur du jury pour sa présentation « allumée » de leur application, qui porte sur un sujet délicat, la santé mentale des jeunes. Destinée à diminuer les symptômes dépressifs par des défis quotidiens à réaliser pour rester actif, UBored? se veut ludique et inspirante. « L’idée est de rester actif et productif. Lorsqu’on complète un défi – des exercices physiques ou d’expression artistique – on peut partager ça sur les réseaux sociaux, ce qui permet d’entretenir l’esprit de compétition », explique Emma.
Les quatre juges étaient Mona-Lisa Prosper directrice de Futurpreneur Canada, Naysan Saran de Cann Forecast, Wemba Opota, Stratège national de la technologie à Microsoft Canada et Étienne Merineau, le fondateur de Heyday.ai.
Propulser les filles en techno
Animé par Cassie Rhéaume, l’une des fondatrices du Mouvement montréalais Les filles et le code et directrice chez Lighthouse Labs Montréal, l’événement se donne aussi pour but de démocratiser la techno. « Les filles en sortent grandies et cela fait naître des passions. Plusieurs n’en sont pas à leur première innovation », explique l’animatrice.
« Ce n’est pas du travail pour elles, elles ont du plaisir à découvrir le code et le langage de programmation. Les filles rencontrent aussi de nombreux professionnels, ce qui leur permet de découvrir une foule de métiers technos », renchérit Camille Sénécal.
« C’est un programme exigeant qui demande un réel engagement de la part des jeunes filles. Il faut qu’elles soient capables de démontrer la validité de leur projet, de la solution qu’elles proposent jusqu’aux aspects techniques en passant par la faisabilité », relève encore Stéphanie Jecrois.
Les huit chapitres canadiens, dont les gagnantes de Montréal-Gatineau-Ottawa, se confrontaient aux équipes des Amériques pour élire des demi-finalistes le 12 juin. Quatre des équipes d’ici se sont qualifiées et iront à la finale mondiale prévue en ligne les 12 et 13 août, pour tenter de décrocher la Bourse de 10 000$ et l’honneur d’être parvenues à faire gagner leur idée destinée à améliorer le monde.