Dans une Salle Bourgie remplie à pas plus du sixième de sa capacité, c’est à une rencontre plutôt intime qu’ont pu assister les spectateurs, dimanche après-midi, en compagnie du pianiste Charles Richard-Hamelin. Visiblement heureux de retrouver le public après plus d’un an de musique sans spectateurs, Richard-Hamelin était dans ses pantoufles puisqu’il jouait dans sa salle préférée et dans sa formule de prédilection, le récital solo. Et personne n’allait s’en plaindre.
Nous avions émis un avis très positif, il y a quelques semaines à peine, sur l’enregistrement des 24 Préludes de Chopin par Richard-Hamelin. Eh bien, ne dit-on pas souvent « C’est bien mieux en vrai »? Cette fois encore, c’était le cas.
Alors que, pour compléter l’album des 24 Préludes¸ le pianiste avait choisi l’Andante Spinato et la Grande Polonaise Brillante, cette fois, pour compléter le programme, il a jeté son dévolu sur deux pièces de Wolfgang Amadeus Mozart : la Fantaisie pour piano en do mineur, K. 475 et la Sonate pour piano no 14 en do mineur K. 457.
Pour la Fantaisie, le virtuose choisit de débuter avec un rythme lent qui est très approprié. On a ensuite l’impression de le suivre dans une promenade printanière avec ce que ça peut contenir de surprises, jusqu’à ressembler à un raz-de-marée… ordonnancé. Cette œuvre, qui n’est pas très mozartienne d’emblée, contrairement à la sonate qui suivra, a des parfums de romantisme avant la lettre, est-ce pour cela qu’elle précède un programme Chopin ?
Dans la Sonate K. 457, présentée comme la deuxième partie d’une œuvre, Mozart est parfaitement reconnaissable, à sa musique « naturelle » : on n’a pas besoin de comprendre grand-chose à la musique pour apprécier celle du grand Wolfgang. Et tout ça, sous les doigts caracolants de Richard-Hamelin, qui tour à tour, chatouille le clavier ou lui transmet toute sa puissance. C’était dramatique à souhait.
Viennent ensuite les Préludes. Si aucune déception n’a pointé le bout de son nez durant la traversée de ce large fleuve pas si tranquille, nous avons quand même eu nos moments préférés. Le numéro 4, romantique juste comme on l’aime. Le numéro 5, une jolie cavalcade. Le numéro 7, comme il me plaisait de le jouer quand j’étudiais Chopin. Le numéro 9 pour son intensité. Le numéro 12 où l’on se dit : une chance que les roues du piano ont été bloquées sinon on le retrouvait au bout de la scène. Le numéro 13 dans lequel la mélodie triomphe encore. Le numéro 15 qui est une œuvre en soi. Le numéro 16, une vraie tempête, alors que le pianiste est partout à la fois sur le clavier autant avec ses mains qu’avec ses yeux.
En rappel, une Fantaisie de Mozart qui se termine dans un élan guilleret à souhait.
On a beau connaître Chopin et commencer à connaître Charles Richard-Hamelin on ne peut s’attendre tout à fait à ce qui s’en vient. Et c’est là une des très grandes qualités de ce surprenant interprète.