Comme on le sait déjà, pour une bonne partie de la population, distinguer les faits des opinions dans un texte peut s’avérer difficile. Une recherche vient d’ajouter à cela que c’est aussi un obstacle à une vérification des faits efficace.
À la base, si un auteur a mis dans son texte un mélange d’affirmations basées sur des faits et d’opinions personnelles, un journaliste vérificateur de faits qui lit ensuite ce texte saura qu’il doit exclusivement cibler les affirmations factuelles, et ignorer les opinions. En bout de ligne, son verdict sera que la partie « factuelle » du texte est vraie ou fausse, et seulement cette partie du texte.
Le problème, écrivent les psychologues Nikita Antonia Salovich et Nathan Walker, de l’Université Northwestern, c’est que le lecteur, lui, ne percevra peut-être pas clairement la différence. Spécialement quand ces opinions « sont conformes à ses croyances préexistantes ». Les deux chercheurs ont donc testé leur hypothèse sur un sujet riche en croyances préexistantes aux États-Unis, le port d’armes, en faisant lire à leurs « cobayes » différents textes présentant un mélange de faits et d’opinions —après avoir vérifié quelle était la position de chacun sur le port d’armes. Résultat, l’effort de vérification des faits (fact-checking) atteint moins sa cible chez ceux dont il contredit les croyances, lorsqu’il part d’un texte qui mélangeait faits et opinions (la vérification est perçue comme « moins juste » et « moins crédible »).
Leur expérience, admettent les chercheurs, montre toutefois ses limites en ceci qu’elle est également dépendante de la capacité des gens à distinguer le fait de l’opinion. Ceux qui réussissent mieux cette deuxième évaluation sont vraisemblablement moins susceptibles de tomber dans le panneau.
Une piste de solution, commentent des professeurs de journalisme: les médias qui couvrent la politique devraient moins souvent essayer de tout résumer à une querelle entre deux opinions égales, et se centrer davantage sur les faits…