Améliorer la sécurité routière en milieu urbain pourrait entraîner une baisse de la criminalité, selon une étude de l’Imperial College, de Londres.
Des experts analysant les données sur le crime et les accidents de voiture dans la ville de Mexico ont découvert un niveau étonnant de synchronisme entre les deux domaines, et le tout sur une base hebdomadaire, ce qui porte à croire que le fait de consacrer davantage de ressources pour éviter les accidents de la route pourrait réduire le taux de criminalité en permettant une lutte plus efficace contre le crime.
Pour cette étude, dont les résultats ont été publiés dans le magazine spécialisé PLOS ONE, les experts ont localisé le moment et l’emplacement de près d’un million d’accidents de voiture et 200 000 crimes violents survenus entre janvier 2016 et mars 2020 à Mexico, en créant un « battement de coeur », appelé ainsi en raison de sa ressemblance avec un électrocardiogramme, de la capitale mexicaine.
Les tendances en matière de collisions et de crimes étaient similaires, jour après jour, et se répétaient selon un cycle hebdomadaire, un concept qui n’a pas été exploré précédemment, affirment les chercheurs. Les experts ont observé des « creux » durant la nuit et des pics en soirée, lorsqu’à l’échelle de la ville, le crime a atteint des sommets 7,5 fois plus élevés qu’au plus fort des creux, contre 12,3 fois plus d’accidents de la route que lors des moments les plus tranquilles.
Selon le principal auteur des travaux, le Dr Rafael Prieto Curiel, « des parties différentes de la ville ont différents battements de coeur en matière de criminalité et d’accidents. Un quartier avec des bars et des restaurants a un battement différent d’un quartier résidentiel ou d’un autre avec des bureaux ou des écoles. L’utilisation des terrains dans une région peut nous aider à expliquer pourquoi nous observons des rythmes cardiaques différents, en plus de faire des projections et des prévisions ».
Les rythmes cardiaques ont été analysés en fonction de leur emplacement spécifique, notamment en raison de leur distance par rapport au métro de Mexico, et d’autres stations de transport collectif, pour créer des « tuiles » municipales. Des tuiles voisines ont des rythmes cardiaques similaires, c’est-à-dire des pics et des creux semblables. Ces pics et creux sont liés à l’activité économique, comme le déplacement des citoyens vers leur lieu de travail.
L’équipe de recherche a aussi constaté que les crimes et les accidents atteignaient leur pic respectif le vendredi soir, et leur creux mardi matin. La méthode mathématique utilisée par les chercheurs peut être appliquée à d’autres villes, disent-ils.
Ces derniers précisent également que si la plupart des villes disposent de ressources – même si les niveaux diffèrent – pour s’attaquer aux crimes, la sécurité routière, elle, jouit d’investissements bien moindres.
Toujours selon le Dr Prieto Curiel, « le fait de se concentrer sur la prévention des accidents de la route améliorerait la prévention du crime dans les régions urbaines, et offrir davantage de ressources aux services de police pour lutter contre la criminalité. Les accidents graves de la route nécessitent généralement la présence de forces policières pour rediriger le trafic et sécuriser l’endroit ».
« Malheureusement, en raison de la synchronisation temporelle entre les accidents et les crimes, les moments où les policiers sont occupés par des collisions sont aussi les périodes où ils sont requis pour combattre la criminalité. Et donc, les accidents de la route réduisent la présence des agents de la paix et pourraient entraîner un allongement du délai de réponse pour d’autres situations urgentes. »
Les accidents de la route font plus de 1,35 million de morts à travers le monde, chaque année, et 50 millions de personnes subissent des blessures non mortelles lors de collisions. Trois fois plus de gens sont tués par des voitures que tout autre type de crime ou d’actes violents, combinés.
Par ailleurs, la criminalité et les accidents de la route sont un problème qui est principalement urbain. Au Mexique, certaines villes souffrent d’un taux de criminalité frôlant le double du taux national, et la majeure partie de la population urbaine a donc peur du crime. Aux États-Unis, par exemple, mentionnent les chercheurs, 54% des accidents de la route mortels survenus en 2018 se sont produits dans des zones urbaines, en hausse par rapport à moins de 40%, en 2000.