Les trois comparses de l’agence de détectives privés Atom sont de retour pour une toute nouvelle enquête dans Petit hanneton, le second tome d’Atom Agency, la série policière créée par le scénariste Yann et le dessinateur Olivier Schwartz.
Le premier tome d’Atom Agency (lire notre critique ici) racontait la création d’une agence de détectives privés par Atom Vercorian, un jeune Arménien, son associée Mireille, une femme indépendante et féministe avant la lettre, et Joseph Villain, un catcheur à la retraite connu sous le nom de Jojo la Toupie. Résoudre le vol des bijoux de l’épouse de l’Aga Khan, une personnalité bien en vue, aurait pu leur accorder une solide réputation s’ils n’avaient donné tout le crédit à la police, et un an plus tard, l’agence qui « tord le cou au crime » est toujours à la recherche de clients. Quand d’anciens membres de la résistance demandent à Tigran Vercorian, commissaire au Quai des Orfèvres, de les aider à retrouver Annette Scarabéo, une ambulancière disparue depuis 1945, ce dernier est bien trop occupé avec la traque de « René la Canne », l’ennemi public numéro un, pour leur prêter main-forte, mais il confiera l’affaire à son fils Atom qui, avec ses deux partenaires, remueront ciel et terre pour retrouver la femme surnommée « Petit hanneton ».
Au-delà d’une simple enquête, les meilleures histoires policières chroniquent une époque ou un milieu particulier, et c’est exactement ce que fait la série Atom Agency en dépeignant la culture peu connue des immigrants arméniens. Petit hanneton s’attarde par exemple à l’Agra Hadig, une cérémonie traditionnelle où on laisse un bébé choisir ce qui sera sa profession parmi un tas d’objets posés au sol (stéthoscope, pinceau, menottes, etc.) et symbolisant les métiers exercés par les membres de sa famille. En plus de revenir sur la résistance en France, le scénariste a recours à un langage très coloré, en injectant à ses dialogues de l’argot parisien, des expressions arméniennes, des injures turques, ou même le patois unique utilisé par les bouchers français de l’époque. Tandis que le premier tome faisait quelques références lointaines à Charles Aznavour, le cousin d’Atom, les célèbres acteurs Jean Marais et Jean Gabin sont partie prenante de l’intrigue cette fois-ci.
Élève de l’école de la ligne claire, les dessins aux lignes d’encrage grasses d’Olivier Schwartz dans Atom Agency possèdent un style résolument rétro, et même une certaine parenté avec la série de bandes dessinées Gil Jourdan. Il est d’ailleurs dommage que la fille de Maurice Tillieux ait refusé que Schwartz reprenne les aventures du personnage, puisqu’il aurait été le choix parfait. Ses images recréent avec exubérance la France des années 1950 : le commissariat de police du Quai des Orfèvres où pratiquement tout le monde a une cigarette collée au bec, les fêtes foraines à la Place d’Italie incluant carrousel et autos tamponneuses, Pigalle et ses prostituées sous la pluie, ou la vie animée des petits cafés. Ses illustrations s’ornent aussi d’une foule de détails en arrière-plan servant à mieux camper l’époque, dont une poupée de Betty Boop, des vieilles réclames de Cinzano et de Peugeot, ou des affiches de Tino Rossi ou du film La Souricière.
Si le premier tome de la série n’était pas mauvais, loin de là, le deuxième s’avère encore meilleur, et en s’inspirant de la communauté arménienne de France, Atom Agency parvient à donner une couleur inédite, et fort sympathique, à ce qui aurait pu n’être qu’une intrigue policière parmi tant d’autres.
Atom Agency, Tome 2 : Petit hanneton, de Yann et Schwartz. Publié aux éditions Dupuis, 56 pages.
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