La démocratie se porte plus mal que jamais sur notre planète: selon un rapport récemment publié par le magazine spécialisé The Economist, la « cote » démocratique de la planète, soit le classement, sur 10 points, de la santé des régimes politiques, a atteint une moyenne de 5,37, l’an dernier, en baisse par rapport à l’année précédente, ce qui est aussi « le plus bas niveau » recensé depuis le début de cet exercice annuel, en 2006.
Selon les auteurs du document, ce recul s’explique largement, mais pas en totalité, « par les restrictions imposées par les gouvernements en matière de libertés individuelles et civiles à travers le monde en raison de la pandémie de COVID-19 ».
Autres coupables: les régions dominées par des « régimes autoritaires », les pays les moins bien classés sur l’échelle de The Economist, particulièrement en Afrique subsaharienne, ainsi qu’en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, deux régions où le « pointage » a reculé entre 2019 et 2020. En Europe de l’Ouest, ainsi qu’en Europe de l’Est, la cote a là aussi diminué. En fait, l’indice de la démocratisation des régimes politiques a reculé partout. Y compris en Amérique du Nord, où la progression de la « note » du gouvernement canadien a en fait masqué un large recul des États-Unis.
En fait, l’an dernier, une vaste majorité des pays, soit 116 sur un total de 167, ou 70% des nations recensées, ont enregistré un déclin sur l’échelle utilisée par The Economist. Seuls 38 (ou 23%) ont progressé au classement, tandis que 13 autres ont stagné. C’est Taïwan qui a enregistré la plus forte progression, alors que le Mali encaisse la plus forte baisse, lit-on dans le rapport. Onze pays ont connu un « changement de régime », soit sept passages vers des gouvernements moins libres, et quatre changements pour une démocratie plus forte.
Chez les « gagnants », on compte le Japon, la Corée du Sud et Taïwan, qui sont tous passés dans la catégorie des « démocraties entières », après un passage du côté des « démocratie limitées ». Quant à l’Albanie, elle est plutôt passée dans le club relativement sélect des « démocratie limitées », après avoir été catégorisée comme un « régime hybride », soit une démocratie avec des pointes marquées d’autoritarisme.
Un transfert de pouvoir vers l’Asie
Si le Japon, la Corée du Sud et Taïwan ont vu leur institutions démocratiques prendre de la force, en Europe de l’Ouest, autrefois un bastion de la démocratie, la France et le Portugal ont tous deux perdu leur statut de « démocratie entière ».
« La pandémie de COVID-19 a accéléré le transfert de pouvoir vers l’Asie en provenance de l’Occident. L’Asie traîne de la patte derrière l’Occident, avec seulement cinq « démocraties entières », comparativement aux 13 de l’Europe, et la région possède aussi sept régimes autoritaires, alors qu’il n’y en a pas en Europe de l’Ouest », mentionnent les auteurs du rapport.
Cependant, l’Asie est la région du monde qui a le mieux géré la pandémie, jusqu’à maintenant, avec de plus faibles taux d’infection et de mortalité, ainsi qu’une reprise plus forte et plus rapide. « La gestion de la pandémie en Europe n’a pas servi de bonne vitrine publicitaire pour la démocratie, ce que le pouvoir autoritaire en Chine n’a pas manqué de souligner », lit-on dans le rapport.
« La pandémie a souligné le fossé croissant entre un Orient dynamique et un Occident sur le déclin, et celui-ci devrait accélérer le transfert de pouvoir en faveur de l’Asie. »
Le Canada bien placé; les États-Unis glissent au classement
Si ce sont, comme toujours, les pays scandinaves (et l’Islande) qui s’installent en tête de classement, en raison de la force de leur régime démocratique, le Canada fait bonne figure, en se positionnant au 4e rang, tout juste derrière la Nouvelle-Zélande.
Ottawa perd cependant des points du côté du « pluralisme électoral », du « fonctionnement de son gouvernement » et de la « participation politique », entre autres.
Le voisin américain, lui, se retrouve du côté des « démocraties affaiblies » ou « incomplètes », en dessous de la France. Fait à noter: ce classement a été établi alors que Donald Trump était toujours président des États-Unis, avec l’instabilité sociale et politique que l’on sait, un « règne » qui a pris fin le 6 janvier, avec la tentative d’insurrection et l’émeute du Capitole, à Washington, lors de laquelle des partisans du président défait ont tenté d’empêcher la certification de la victoire de Joe Biden, ou, pire, de kidnapper ou tuer des parlementaires.
La Russie, elle, croupit en fond de classement, en compagnie de nations aussi peu recommandables que l’Éthiopie, le Niger et le Qatar.
La Chine est classée encore plus bas, juste au-dessus de l’Iran. Et la Corée du Nord ferme la marche, sans surprise.