L’attrait de la Deuxième Guerre mondiale est indéniable. Cela étant dit, cela s’explique-t-il par le fait qu’il s’agit de la dernière grande confrontation entre les « bons », soit les Alliés relativement démocratiques, et les « mauvais », les puissances de l’Axe? Ou est-ce plutôt parce que l’éloignement du conflit en gomme les nuances idéologiques, sociales, économiques et politiques? Quoi qu’il en soit, en misant de nouveau sur la guerre de 1939-1945, Electronic Arts et DICE ont remporté leur pari avec Battlefield V.
D’abord lancé en 2018, mais peaufiné, voire bichonné depuis par les développeurs, comme tout bon jeu principalement multijoueurs qui se respecte, Battlefield V se déroule donc durant le même conflit qui avait lancé la tendance des jeux de tir à la première personne à saveur historique, notamment du côté des franchises Medal of Honor et Call of Duty.
Après avoir erré pendant longtemps du côté des conflits contemporains, puis avoir complètement changé son fusil d’épaule et s’être intéressée à la Première Guerre mondiale, conflit difficile à transposer de façon « excitante » dans un jeu vidéo s’il en est un, voilà donc un retour à la Deuxième Guerre mondiale. Et pour l’occasion, DICE propose un bijou encore un peu trop brut pour son propre bien.
Ce n’est pourtant pas du côté des visuels que l’on trouvera à redire. Les environnements sont magnifiquement détaillés et variés (on passe des champs français aux déserts africains, en passant par les îles du Pacifique, ou encore les montagnes norvégiennes, sans oublier les villes allemandes ravagées par les combats), les décors semblent plus réalistes que jamais, sans ces longues sections rectilignes qui dénotent l’artificialité des choses (ou la paresse des développeurs), et le son est non seulement fantastiquement travaillé, mais il est aussi proposé en différentes déclinaisons, pour autant d’expériences variées.
Bien entendu, on pourra critiquer l’absence de véritable campagne, à l’exception d’une poignée de missions solitaires où l’on suit, pendant deux ou trois heures au maximum, le destin d’un héros de l’un ou l’autre des deux camps qui se sont affrontés lors de cette guerre sanglante. Si cette décision permet effectivement de varier davantage les décors et les contextes dans lesquels des hommes se sont étripés, on reste quelque peu sur notre faim.
Soulignons, toutefois, l’intérêt porté aux histoires de guerre des tirailleurs sénégalais, appelés en renfort de l’Afrique pour défendre la « puissance coloniale » française, avec une réflexion essentielle sur le racisme qui prévalait sur le champ de bataille. On n’évoque pas le même traitement réservé aux Indiens par les Britanniques, ou aux Noirs américains, ou encore l’internement des Japonais dans des camps aux États-Unis après Pearl Harbor, mais il faut croire que pour une série qui s’est toujours articulée autour de la bravoure du soldat ordinaire, il faut bien commencer quelque part.
Courage et textures surprises
Parlons-en, d’ailleurs, de cette glorification du courage des soldats. La voix toujours aussi belle de Mark Strong à la narration ne suffit pas à contrer le ridicule dégoulinant dont est tartiné Battlefield V. Oui, il fallait repousser la machine de guerre de l’Axe, mais il y a certainement une juste mesure en tout, et c’est tout juste si la séquence d’introduction, avec ses sections jouables, n’est pas suivie d’une publicité du service local de recrutement militaire.
Le jeu a aussi la fâcheuse tendance à faire apparaître, de façon inattendue, des textures et d’autres objets dans le champ de vision du joueur. On aura beau pousser les options graphiques au maximum, et disposer d’un ordinateur capable d’afficher le tout sans trop de soucis, on a constamment droit à ces moments qui brisent l’immersion du joueur. Est-ce un problème de l’engin graphique? Faut-il blâmer la machine qui a permis d’effectuer le test? Mystère. Quoi qu’il en soit, ce défaut visuel agace.
Autrement, le jeu est largement sans failles. Surtout l’intelligence artificielle, qui est franchement surprenante. Les ennemis tenteront ainsi de vous encercler, tâcheront de vous faire sortir de votre cachette en vous lançant des grenades ou en vous attaquant sur plusieurs côtés à la fois… Le côté vicieux des troupes ennemies est parfois étonnant.
Et le multijoueurs, dans tout ça? Les divers modes habituels sont là, dont l’affrontement classique où deux camps tentent de contrôler divers points sur une carte, et où la durée de vie d’une tentative est généralement de moins d’une minute.
Pour ceux qui souhaitent prolonger l’expérience, et surtout ne pas mourir sous les balles d’un tireur embusqué qui consacre toutes ses journées à se perfectionner, il est possible de tenter plusieurs missions spéciales en solo ou dans un groupe allant jusqu’à quatre personnes. Plaisir (et difficulté) assuré!
Faut-il donc se procurer Battlefield V? Dans le genre, franchement, le titre fait fort. Surtout lorsque l’on souhaite se détendre pendant une demi-heure, voire une heure, sans trop se casser la tête, et tout en profitant d’un environnement visuel et sonore quasi parfait. Il est toutefois suggéré d’attendre une vente pour effectuer son achat. En gros, c’est un très bon jeu à 25$, mais probablement pas à 50$…
Battlefield V
Développeur: DICE
Éditeur: Electronic Arts
Plateformes: Windows, Xbox One, PlayStation 4 (testé sur Windows / Steam et Origin)
Jeu disponible en français