Une petite salle. Une salle minuscule, en fait. Et un public plus que réduit, le bas du visage mangé par le masque obligatoire. Pandémie ou pas, rien n’empêche cependant Mathieu Arsenault, seul sur scène, de se livrer à un réquisitoire endiablé contre le côté « gnan-gnan » de la culture et de notre société de consommation. Fort heureusement, d’ailleurs, car cette Vie littéraire tombe à point nommé.
Seul sur scène, donc. Mais dans sa voix, dans ces élans poétiques bien sentis, dans cette diatribe contre tout ce que notre civilisation compte de mou, d’ordinaire, d’agaçant et de détestable, Mathieu Arsenault se démultiplie. Dans la voix de cette jeune femme à la recherche de quelque chose – de n’importe quoi, en fait –, et qui ne trouve plus la motivation de lire que lorsqu’elle est assise sur le bol de toilette, pendant les 10 minutes nécessaires à l’accomplissement de sa besogne, c’est tout un pan de notre société qui se reconnaît.
Bien entendu, cette remise en question, ou plutôt ce coup de gueule, selon la façon dont on pourrait être amené à le décrire, tout cela peut parfois paraître galvaudé, surtout en cette période d’incertitude et d’anxiété généralisées.
Pourtant, entouré de quelques inconnus dans une salle sombre, bien entendu séparés des autres membres du public par des sièges laissés vacants, en ayant un peu l’impression de tromper la mort, le tout pour entendre un homme parler pratiquement sans arrêt pendant 45 minutes, on se prend à s’éprendre de poésie, de création, d’un univers portant sur les arts, d’un univers parlant d’intelligence et de complexité.
Au diable les « ça va bien aller » et la ruée sur le papier toilette, la reprise des spectacles est la véritable renaissance dont avait plus que besoin notre société sclérosée. Dommage, alors, que ce « retour à la normal » ne durera qu’un temps, avec la multiplication des cas de contamination.
En attendant une éventuelle nouvelle fermeture des salles de spectacles en raison de ce désir en apparence irrépressible de faire la fête sans prendre de précautions contre le nouveau coronavirus, La vie littéraire est un baume pour les esprits accablés par la lente détérioration de notre civilisation.
La vie littéraire, de Mathieu Arsenault. Présenté à La Chapelle jusqu’au 29 septembre.