À nouveau monde, nouvelle façon d’organiser l’éducation? L’UNESCO a publié mardi son plus récent Rapport mondial de suivi sur l’éducation, et l’agence onusienne appelle à repenser ce domaine essentiel dans la perspective d’un monde post-pandémie, d’autant plus que la COVID-19 a exacerbé des disparités déjà importantes.
Le rapport en question révèle que moins de 10% des pays possèdent des lois visant à éviter que certaines tranches de la population soient exclues des services d’éducation. Ce phénomène d’exclusion s’est par ailleurs aggravé depuis le début de la pandémie, alors que 40% des pays à faible et moyen revenu n’auraient pas soutenu les apprenants défavorisés pendant la fermeture temporaire des écoles, en lien avec les mesures de confinement.
Il faut se concentrer sur ces laissés pour compte lors de la réouverture des écoles, plaide ainsi l’UNESCO, « afin de rendre les sociétés plus résilientes et plus égalitaires ».
« Afin de relever les défis de notre temps, il est impératif d’évoluer vers une éducation plus inclusive », a déclaré la directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, dans des propos publiés sur le site internet des Nations unies. « Repenser l’avenir de l’éducation est d’autant plus important après la pandémie de COVID-19, qui a encore aggravé et mis en lumière les inégalités. L’absence d’action entravera le progrès des sociétés », a-t-elle ajouté.
Selon le rapport, ce sont 258 millions d’enfants et de jeunes qui n’ont accès à aucune instruction, notamment en raison de leur pauvreté. « Dans les pays à faible et moyen revenu, les adolescents issus des 20% de ménages les plus riches ont trois fois plus de chances de terminer le premier cycle de l’enseignement secondaire que ceux des ménages les plus pauvres. Parmi ceux qui ont achevé le premier cycle de l’enseignement secondaire, les élèves des ménages les plus riches ont deux fois plus de chances de posséder des compétences de base en lecture et en mathématiques que ceux des ménages les plus pauvres », souligne le document.
Un grand retard à rattraper
Et si les Nations unies se sont donné comme objectif de faire en sorte que tous les élèves terminent les deux cycles du secondaire d’ici 2030, il existe toujours une vingtaine de pays, notamment en Afrique subsaharienne, où les jeunes femmes pauvres n’ont pratiquement aucune chance d’atteindre ce niveau de diplomation.
Par ailleurs, le rapport indique aussi que « les élèves de 10 ans des pays à revenu moyen et élevé qui ont reçu un enseignement dans une langue autre que leur langue maternelle obtiennent généralement des résultats inférieurs de 34% à ceux des locuteurs natifs dans les tests de lecture ».
« La pandémie de COVID-19 nous a offert une réelle opportunité de repenser nos systèmes éducatifs », estime de son côté Manos Antoninis, directeur du Rapport mondial de suivi sur l’éducation. « Mais le passage vers un monde qui valorise et accueille la diversité ne se fera pas du jour au lendemain. Il existe une tension évidente entre l’enseignement dispensé à tous les enfants sous un même toit et la création d’un environnement où les élèves apprennent le mieux. Mais la COVID-19 nous a montré qu’il était possible de faire les choses différemment si nous faisions l’effort nécessaire ».
Et malgré les nombreuses carences soulignées dans le rapport, l’UNESCO précise qu’il existe un « manque chronique » de données fiables sur les personnes laissées pour compte. Difficile, voire parfois impossible de venir en aide à ceux qui en ont besoin si les autorités et les divers organismes n’ont carrément pas connaissance de l’existence des problèmes.
« Les enquêtes auprès des ménages sont essentielles pour ventiler les données sur l’éducation en fonction des caractéristiques individuelles. Mais 41% des pays – où vit 13% de la population mondiale – n’ont pas mené d’enquêtes ou, quand ils l’ont fait, n’ont pas rendu publiques les données recueillies. Les chiffres sur l’apprentissage sont principalement tirés des écoles et ne tiennent pas compte des personnes qui ne les fréquentent pas », précise encore le rapport.