Les archéologues ont des alliés à quatre pattes: des recherches récentes mettent en lumière le pouvoir du nez canin pour assister ces scientifiques à la recherche de vieilles sépultures, raconte The New YorkTimes.
Explorant le site de la nécropole ancienne de Drvišica, en Croatie, Panda, un des deux Bergers belges malinois, s’était soudain figé, le nez pointant vers un coffre en pierre. Il avait localisé l’odeur de dépouilles vieilles de milliers d’années.
Là où son museau pointait, les archéologues avaient en effet trouvé des fragments de dents et d’os humains quelques mois plus tôt, mais ces restes avaient été retirés pour analyse et datation au carbone 14.
On utilise déjà depuis longtemps des chiens de détection de restes humains, pour aider à retrouver les disparus lors de catastrophes naturelles, de meurtres ou de suicides. Ils sont peu appelés en archéologie, mais l’expérience en Croatie, menée en 2015 et 2016, visait à démontrer que cette méthode inhabituelle pourrait donner des indications échappant aux scientifiques.
Ceux-ci avaient découvert sur ce site trois tombes contenant des restes humains vieux de 2700 ans, dans des coffres en calcaire brut, accompagnés d’ornements comme des fragments de ceinture et des perles d’ambre. En théorie, l’expédition archéologique canine, initiée par l’archéologue de l’Université croate de Zadar, Vedrana Glavaš, pouvait permettre de localiser d’autres tombes.
Tests complexes
Toutefois, pour le démontrer, ce n’est pas aussi facile qu’il en a l’air. Les restes humains très anciens présentent probablement un profil olfactif différent — et plus faible — que les cadavres plus récemment décédés, de sorte que la façon « d’entraîner » le chien reste incertaine. Les chercheurs essaient de déterminer quels composés organiques volatils, dans les restes humains, sont importants pour l’odorat du chien. Ils ignorent par ailleurs quels aspects d’un environnement donné aident à conserver l’odeur.
Sans compter les faux positifs: les chiens sont de « grands détecteurs d’anomalies », rappelle le reportage du Times. Quelque chose d’aussi subtil qu’un sol récemment perturbé peut provoquer une fausse alerte pour l’animal.
Les fouilles de la nécropole, parce qu’elles mélangeaient des emplacements connus et d’autres moins connus, ont permis de réaliser, avec quatre chiens, les premiers tests contrôlés. Les archéologues à quatre pattes ont trouvé quatre nouvelles tombes et identifié un cinquième site où pourrait se trouver un caveau alors inconnu.
Les résultats, publiés dans le Journal of Archaeological Method and Theory, montrent en tout cas la capacité des chiens à détecter de très petites quantités d’odeurs spécifiques à la décomposition humaine, dans des sépultures beaucoup plus anciennes que ce que les chercheurs soupçonnaient.
Aux États-Unis, les chiens ont aussi collaboré à une variété de trouvailles de sites amérindiens, dont certains excavés par des pillards. Un dresseur de chiens du Tennessee, Paul Martin, s’en fait une spécialité depuis 20 ans. En compagnie de John Sullivan, alors archéologue d’État à Winterville Mounds près de Greenville, il avait mis à jour des os humains, y compris l’omoplate d’un enfant, dans deux zones amérindiennes du Mississippi datant des environs de l’an 1450.
Deux archéologues du Centre archéologique du Sud-Est, au Service des parcs nationaux des États-Unis, Mike Russo et Jeff Shanks, avaient également sondé 14 fois un site prometteur de la Floride avec des chiens, sans résultats.
Mais lorsqu’ils ont fait appel, en 2013, à Suzi Goodhope et à Shiraz, un Berger belge malinois expérimenté en détection de cadavres, leur chance a tourné. Au sein d’un terrain plat et broussailleux, le chien s’est assis. Ils ont creusé, et ont trouvé un os d’orteil humain vieux de plus de 1300 ans.