Difficile de ne pas associer instinctivement film ambitieux réalisé avec un budget relativement réduit, années 1980 et John Carpenter. Le réalisateur a beau jouir d’une popularité importante, depuis quelques décennies, cet attrait de la part des cinéphiles est surtout le fait des amateurs de films de genre. Action, horreur, suspense… les films de Carpenter, et plus spécialement ses plus connus, sont tout plus ou moins reconnaissables à leur style particulier. Et The Thing, classique culte de 1982, ne fait pas exception à la règle.
Dans un avant-poste de recherche du gouvernement américain en Antarctique, une équipe de chercheurs – et le personnel de soutien qui les accompagne – est aux prises avec une étrange créature extraterrestre, sortie de sa gangue de glace par un groupe de scientifiques norvégiens pas très loin de là, et qui est capable d’absorber et d’imiter toute forme de vie qu’elle rencontre.
Parmi ce groupe, on trouve des chercheurs, un médecin, des gens responsables de la cuisine et de l’entretien, et bien entendu Kurt Russell, avec qui Carpenter a entre autres travaillé l’année précédente, en 1981, pour le fantastique Escape From New York, autre film ambitieux aux moyens relativement limités. Dans The Thing, Russell joue MacReady, un pilote d’hélicoptère un peu casse-cou (quelle surprise!) qui devra prendre les choses en main pour tenter de combattre la lente infestation extra-terrestre de ses collègues, alors que l’équipe est incapable de contacter les autres bases scientifiques en Antarctique.
Russell, donc, se rendra bien compte, en compagnie de ses confrères, qu’il est nécessaire de combattre rapidement et violemment cet ennemi venu des étoiles. Fort heureusement, la base de recherche semble construire en carton, avec des murs et des fenêtres qui se brisent aisément pour accentuer le côté dramatique des scènes d’action, mais dispose d’une quantité surprenante d’armes à feu et de lance-flammes.
Ces derniers, sans doute utilisés pour faire fondre l’encombrante neige qui s’accumule constamment, seront maintenant les seules armes vraiment utiles pour tuer les versions mutantes et dégénérées des chercheurs qui mourront un à un pour être remplacés par d’obscènes copies.
Car The Thing possède certainement un scénario classique: le monstre s’infiltre dans un endroit coupé du monde, les personnages meurent les uns après les autres, et la tension est exacerbée par le fait que l’ennemi est quasiment invisible. Bien sûr, les quelques humains survivants finiront par s’accuser mutuellement d’être des copies, tandis que le véritable ennemi, lui, se préparera lentement à porter le coup de grâce.
Quelques aspects permettent au film de se distinguer de la meute d’oeuvres similaires. D’abord, le jeu presque surfait de Russell, qui s’amuse clairement à jouer les badass, les cheveux au vent. S’il avait pu le faire, il aurait sûrement retiré sa veste pour se retrouver en camisole et montrer ses avant-bras musclés. Héros d’action un jour, héros d’action toujours…
Ensuite, le génial Ennio Morricone collabore à la bande sonore du film. On aurait pu croire que Carpenter lui-même aurait signé la bande son, d’autant plus que le film correspond exactement à ses penchants pour les synthétiseurs et la musique électronique rétro, mais c’est plutôt le maître déjà connu pour ses musiques western qui fournit ici une trame musicale discrète, mais quand même présente.
Enfin, et c’est peut-être là le point le plus « vendeur » du film, les effets spéciaux sont plus que spectaculaires: ils sont parfaits. Oui, il est flagrant que les personnages sont quelques fois filmés à travers des panneaux de verre sur lesquels des décors ont été peints, notamment lorsqu’ils explorent le vaisseau spatial abandonné, au début du film, et certains effets ont vieilli, près de 40 ans après la sortie du film, mais The Thing est un triomphe pour les effets spéciaux « à l’ancienne ». Il ne faut pas oublier que les premières images de synthèse utilisées dans un film n’ont fait leur apparition que cette même année 1982, pour le long-métrage de science-fiction Tron. Ici, le monstre et toutes ses déclinaisons ne sont pas animés par ordinateur, mais découlent plutôt de la folle créativité des artisans maniant colle, peintures et autres prothèses en caoutchouc. Tout est horriblement gluant, les créatures semblent toutes plus terrifiantes et catastrophiquement déformées les unes que les autres, et la quantité de pattes, tentacules et autres fluides excessivement gore qui sont visibles dans le film remettent sérieusement en question la loi sur la conservation de la masse.
Considéré comme un film d’horreur, The Thing est plutôt l’une de ces oeuvres que l’on voudra voir et revoir, possiblement entre amis, et avec quelques bonnes bières à sa disposition. Loin d’être un « grand » film, le long-métrage mérite néanmoins sa place au panthéon du septième art, ne serait-ce que parce qu’il représente ce qui se faisait probablement de meilleur en matière d’effets spéciaux en 1982.