Si la planète entière se réchauffe, il n’est pas étonnant que les océans se réchauffent aussi. Pourtant, derrière la nouvelle information publiée cette semaine, il y a une autre information, fondamentale pour comprendre l’avenir qui est en train de se dessiner.
La température des « océans mondiaux, en 2019, était la plus chaude » depuis plus de 60 ans que de telles mesures sont prises systématiquement, selon une étude signée par 14 scientifiques chinois et américains et parue mercredi dans la revue Advances in Atmospheric Sciences. Il s’agit plus particulièrement de la partie des océans située dans les premiers 2000 mètres sous la surface. Le phénomène semble s’accélérer depuis le milieu des années 1980.
Or, l’information fondamentale derrière tout cela est que les océans sont les principaux « puits » d’absorption des surplus de CO2 que nous émettons. Autrement dit, une partie de nos émissions, plutôt que de s’en aller dans l’atmosphère et de contribuer directement au réchauffement, est absorbée par les océans (tout comme une partie, plus petite, est absorbée par les arbres et les plantes). Le résultat net est donc que les océans se réchauffent. Accessoirement, cela fournit une mesure de plus en plus précise aux scientifiques pour évaluer la part attribuable au réchauffement « naturel », et celle attribuable à nous. L’étude rappelle qu’environ 90% de l’excès de chaleur, depuis 1970, est allé dans les océans, contre moins de 4% dans l’atmosphère et sur la terre ferme.
Pour les amateurs de chiffres: les océans auraient ainsi absorbé depuis 25 ans l’équivalent de près de 228 000 000 000 000 000 000 000 000 de joules de chaleur provenant des activités humaines. L’un des chercheurs a proposé une métaphore: ce serait l’équivalent de la chaleur dégagée par quatre bombes atomiques comme celle d’Hiroshima à chaque seconde. Comme le réchauffement s’accélère, on est peut-être déjà rendu à cinq bombes par seconde.
La nouvelle étude s’alimente en partie sur le réseau de balises Argo: plus de 3000 instruments qui, à travers les océans, mesurent la température et la salinité de l’eau à la surface et jusqu’à 2000 mètres de profondeur, et relaient leurs données par satellite.
Au-delà des chiffres, il y a des conséquences pour la vie marine: plus une eau contient de CO2, plus elle est acide, ce qui affaiblit la coquille des mollusques et peut aller jusqu’à la dissoudre; les coraux quant à eux blanchissent et risquent de disparaître. Par ailleurs, une eau plus chaude dissout moins facilement l’oxygène, ce qui en prive d’abord les espèces vivant dans les profondeurs. Enfin, une eau plus chaude augmente potentiellement la puissance des ouragans.