Près de 50 ans après sa publication originale, Notes d’Okinawa, de Kenzaburō Ōe, est traduit en français aux éditions Picquier. Il s’agit d’un objet rare qui prend sans doute un intérêt particulier, cinquante ans après les faits: la rétrocession de l’archipel des Ryukyu au Japon après l’occupation américaine, de 1945 à 1972.
L’auteur partage ses réflexions sur les événements passablement troublants qui ont entouré le retour d’Okinawa dans le giron japonais. Son regard est tantôt sociologique, tantôt politique, tantôt militaire, parfois même culturel, mais, avant tout personnel.
En tant que Japonais d’Hondo, il pose un regard extérieur, mais si peu, sur le drame d’Okinawa, dès la célèbre bataille et jusqu’aux négociations et aux tromperies dont ont été victimes les Okinawaiens autant de la part des Américains que de celle de leur propre premier ministre. Il examine avec philosophie, différents écrits et prises de parole des chantres de la rétrocession. Et, sur une base plus personnelle, il se pose deux questions fondamentales: Qu’est-ce qu’un Japonais? Et puis-je devenir un autre Japonais que ce Japonais-là?
Cette dernière réflexion rappelle le questionnement qu’ont connu les citoyens allemands à la suite de l’holocauste et le même malaise profond est perceptible.
Le tout est traité dans un style rigoureux, plein d’hésitations philosophiques et de détails très précis qui démontrent bien l’ampleur du travail de recherche. On ne reçoit pas un prix Nobel pour rien. À lire dans un environnement sans distraction.