En lice pour le prix du cauchemar de l’année: des humains ont répandu à l’autre bout du monde une forme contagieuse de cancer.
Il s’agit d’un cancer qui attaque les moules, faut-il préciser. Mais ce cancer, qui ne frappait jusqu’ici qu’une seule espèce d’Europe, a désormais pris ses aises en Amérique du sud, chez une autre espèce. Aucun contact naturel ne peut expliquer ce déplacement: seuls les bateaux peuvent être blâmés, écrivent Michael Metzger et ses collègues biologistes de cinq pays, dans leur rapport publié par la revue eLife.
Il est certain que d’ordinaire, un cancer n’est pas contagieux. On n’en connaît que trois cas dans le monde animal: un cancer du visage chez un animal appelé le diable de Tasmanie, un cancer chez certains chiens, transmissible au moment de l’accouplement, et celui chez cette moule, dont on a aussi établi qu’il était, en théorie, transmissible entre différentes espèces de moules. La particularité avec la recherche parue cette semaine est que, des moules n’étant pas particulièrement réputées pour voyager, on ne se serait pas attendu à ce que cette contagion puisse se faire ailleurs que chez leurs plus proches voisines.
Mais déjà, il y a trois ans, une analyse génétique avait trouvé des points communs entre les cancers présents chez des moules vivant sur les côtes de Colombie-Britannique et de France. Cette fois, ce sont des moules d’Argentine et du Chili, atteintes de ce même cancer, qui sont passées sous le microscope. Sur la base des marqueurs génétiques en question, les chercheurs concluent qu’il s’agit bel et bien du même type de cancer, et qu’il n’a pu se retrouver là que si les différentes « populations » de moules sont entrées en contact, par exemple par l’intermédiaire de la coque d’un navire complaisant. « Tout ce qu’il vous fallait, c’était un animal malade », résume dans le New York Times Michael Metzger.
Il y a probablement d’autres espèces, sur terre ou dans les mers, qui sont porteuses d’un cancer contagieux, et qui n’ont pas encore été découvertes, admettent les biologistes.