Nouveau coup de théâtre au Royaume-Uni, alors que le vaudeville politique du Brexit s’est enrichi d’un nouveau revirement de situation, mardi: le député conservateur Philip Lee a quitté les rangs de son parti et joint ceux des libéraux-démocrates alors même que le premier ministre Boris Johnson prononçait un discours au Communes.
Moment d’incrédulité, à cette deuxième journée officielle d’entrée en fonction du nouveau premier ministre, qui perd ainsi sa majorité parlementaire qui ne tenait qu’à une voix.
M. Lee, membre du Parti conservateur depuis 1992, et député depuis 2010 dans la circonscription de Bracknell, à l’ouest de Londres, a par la suite publié une brève annonce dans laquelle il affirme que « le gouvernement conservateur vise de façon agressive un Brexit qui provoquera des dégâts, et ce sans respecter les principes élémentaires. Le gouvernement fait courir des risques inutiles à des individus et menace des emplois, en plus de mettre à mal l’intégrité du Royaume-Uni ».
« Plus largement encore, poursuit-il, le gouvernement sape notre économie, notre démocratie et notre rôle sur la scène internationale. Il emploie des tactiques de manipulation politique, de harcèlement et a recours aux mensonges. Et il agit de la sorte de façon délibérée. Voilà pourquoi je rejoins Jo Swinson (la chef) et les libéraux-démocrates. Je crois qu’ils sont les mieux placés pour construire une force politique unificatrice et inspirante permettant de combler le fossé qui nous divise, et faire de notre pays un meilleur endroit pour les générations futures. »
Avec ce départ, le Parti conservateur pourrait bien ne plus disposer de suffisamment de voix aux Communes pour former la majorité, en collaboration avec les unionistes irlandais du DUP. Cette majorité n’était en effet que d’une seule voix.
Le coup d’éclat a d’ailleurs provoqué l’incrédulité de M. Johnson, qui a levé les yeux du texte de son discours pour tenter de comprendre ce qui se produisait pendant son allocution.
Ce changement d’allégeance politique survient au lendemain d’une mise en garde sévère du premier ministre, qui affirmait qu’il déclencherait des élections anticipées le 14 octobre si des députés conservateurs rebelles décidaient d’appuyer un projet de loi réclamant un nouveau report de la date de sortie de l’Union européenne et imposant la conclusion d’un accord.
Confronté à cette fronde, le premier ministre avait indiqué que tous les députés conservateurs opposés à sa façon de mener le processus du Brexit n’auraient plus l’opportunité de représenter le parti aux prochaines élections. En voulant faire taire les députés séditieux, toutefois, il semble bien qu’il ait contribué à pousser certains députés vers la sortie.
La carrière de M. Johnson comme premier ministre a débuté sur les chapeaux de roues: élu avec une certaine peine à la chefferie du Parti conservateur, l’ancien maire de Londres a rapidement fait savoir qu’il allait proroger les travaux du Parlement, faisant en quelque sorte disparaître deux semaines de travaux parlementaires où les députés conservateurs dissidents et les membres de l’opposition auraient effectivement pu tenter de faire adopter leur projet de loi sur le Brexit. L’opposition a qualifié le geste de « coup d’État » et s’est engagée à tenter de siéger malgré tout. Même le président de la Chambre, pourtant un député conservateur, a pesté contre ce « tour de force constitutionnel ».
Le Royaume-Uni doit normalement quitter l’Union européenne le 30 octobre. Aucun accord de sortie n’a encore été adopté par le Parlement britannique, et Bruxelles a déjà indiqué qu’elle n’entendait pas renégocier l’entente à laquelle l’Europe était parvenue avec la prédécesseure de M. Johnson, Theresa May.
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