« Je suis la personne la moins raciste que vous connaissiez. » À au moins six reprises en deux ans, et à nouveau le mois dernier, Donald Trump a fait cette affirmation. Le Détecteur de rumeurs constate que de démontrer si une affirmation de ce genre est vraie ou fausse est à la fois très facile et très difficile.
Tout d’abord, il n’existe aucune unité de mesure définissant une personne raciste. Certes, l’usage de certains mots est devenu inacceptable au fil des décennies, mais un politicien habile se gardera bien de les utiliser. En revanche, beaucoup d’autres mots ou expressions, qui ont une connotation raciste pour les uns, seront perçus par d’autres comme « politiquement incorrects ». Des chercheurs comme la sociologue canadienne Michele Lamont, qui enseigne à l’Université Harvard, préfèrent plutôt définir le discours raciste par ses grands thèmes: « Le parasitisme, la déloyauté, l’incompatibilité civique, morale et culturelle. »
Dans le cas de Trump, c’est l’accumulation de ses actions et l’addition des énormités sorties de sa bouche ou de son clavier qui jouent contre lui.
Au niveau des actions, on trouvera des listes plus exhaustives établies par le magazine Vox et par le New York Times. Retenons simplement ici que:
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La toute première apparition de Donald Trump dans le New York Times, en 1973, fait référence à une poursuite déclenchée par le ministère américain de la Justice contre la Trump Management Corporation, pour avoir refusé de louer ses appartements à des Noirs (la compagnie a perdu).
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En 1989, Trump achète des pages de publicité dans les journaux de New York, réclamant la peine de mort pour les cinq accusés du viol d’une joggeuse dans Central Park. Les accusés — quatre adolescents noirs et un hispanique — condamnés au terme d’un procès bâclé, seront libérés des années plus tard, lorsque le véritable coupable, preuve d’ADN à l’appui, sera trouvé. Trump a toujours refusé d’admettre son erreur.
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En 1992, le Trump Plaza Hotel et Casino doit payer une amende de 200 000 dollars pour avoir changé de tables des croupiers noirs, à la demande de joueurs blancs.
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Et c’est à lui qu’on doit la fausse rumeur voulant que Barack Obama ne soit pas né aux États-Unis.
Au niveau des mots, notons entre autres:
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Les immigrants mexicains sont des criminels et des violeurs (2015).
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Le juge chargé du procès pour fraude de la Trump University (2016) devrait se récuser « parce qu’il est Mexicain » (il est né en Indiana).
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Un gazouillis montrant Hillary Clinton devant une pile de dollars et une étoile de David.
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L’épithète « Pocahontas » pour désigner la sénatrice Elizabeth Warren.
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S’adressant à des électeurs noirs: « Vous vivez dans la pauvreté, vos écoles sont médiocres, vous n’avez pas de travail (…) Qu’est-ce que vous avez à perdre? » (2016)
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Défendant les suprémacistes blancs après une manifestation ayant fait un mort (2017): « il y a des bonnes personnes des deux côtés ».
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Les immigrants d’Haïti « ont tous le sida » (2017, propos rapportés par plusieurs témoins).
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Multiples attaques contre les footballeurs de la NFL, surtout des Noirs, qui s’agenouillaient pendant l’hymne national en protestation contre le racisme (2017).
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Multiples usages du mot « invasion » pour désigner les immigrants d’Amérique centrale.
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Multiples usages du mot « infestation » pour désigner des quartiers ou des villes, qui s’avèrent presque toujours être à majorité noire et/ou représentés par un élu noir.
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Et tout récemment, cette invitation à quatre élues démocrates de « retourner dans leurs pays » (toutes quatre sont citoyennes américaines, trois sont nées aux États-Unis).
Verdict
S’il est impossible de démontrer hors de tout doute à quel degré une personne est raciste, le Détecteur de rumeurs peut affirmer que Donald Trump n’est pas la personne la moins raciste que l’on connaisse.