Pour cette deuxième édition de la série Les jeux préférés de…, il est déjà temps de s’éloigner un peu du cadre établi en discutant avec Mandalore Gaming, un YouTubeur spécialisé en jeux vidéo, que l’on pourrait considérer comme un observateur de l’industrie.
Bien installé dans le monde de moins en moins secret des critiques de jeux vidéo sur l’omniprésente plateforme appartenant à Google, Mandalore Gaming – Mandy pour les intimes – a réussi, en trois ans environ, à trouver son public avec des vidéos portant autant sur des franchises développées par des grands studios que sur des titres obscurs et particulièrement tordus créés par des équipes d’Europe de l’Est ou de Russie. Le tout pour le plus grand plaisir de ses quelque 270 000 abonnés.
Malgré cette solide présence en ligne, le jeune homme se fait discret. À commencer par son nom: ce sera Mandy, donc, et rien de plus. « J’avais un emploi où on ne m’interdisait pas nécessairement d’avoir une chaîne YouTube, mais cela a entraîné une véritable séparation entre le vrai travail et mes vidéos un peu cocasses », explique-t-il.
Pourquoi s’être lancé, justement, dans la création de vidéos? « Oh, là là, ça me ramène en arrière… Cela semblait être quelque chose d’amusant à faire; la plupart des gens commencent (à créer des vidéos) sous la forme d’un passe-temps. Je ne connais pas beaucoup de personnes qui réussissaient vraiment à tirer leur épingle du jeu lorsqu’ils se lançaient là-dedans de façon sérieuse dès le départ, pour faire de l’argent. Cela semblait être quelque chose d’intéressant, et très rapidement, je me suis dit que j’allais prendre des suggestions d’internautes pour critiquer des jeux, et je n’avais pas de problème à ce que ce soit la chose la plus étrange, la plus bizarre, la plus champ gauche, je vais simplement travailler fort. Ce qui est un peu, vous savez, à l’encontre de la façon dont YouTube favorise les contenus. Au final, ça a marché. »
Les vidéos de la chaîne Mandalore Gaming peuvent-elles être considérées comme du travail journalistique? Ou s’agit-il plutôt de divertir, tout simplement? « J’ai une formation universitaire, mais ce n’est pas en journalisme… Disons que je suis un type avec un logiciel de montage vidéo? Je ne pense pas que j’ai les qualifications pour être un journaliste. Je crois qu’il existe beaucoup de différences, surtout en ce qui concerne les normes à respecter en tant que journaliste. Si j’invente des choses pour une vidéo, je peux simplement le diffuser; dans une publication, le contenu doit être vérifié par d’autres personnes. »
La liste
À regarder l’ensemble des vidéos publiées sur sa chaîne, on pourrait croire que Mandalore Gaming a certes des préférences personnelles, mais aussi que les jeux testés et critiqués appartiennent à bien des genres différents. On y trouve de la science-fiction, de l’action, de l’horreur, des jeux de rôle, de stratégie, etc. Comment expliquer ce côté bigarré?
« En gros, j’accepte les suggestions d’internautes, que ce soit par courriel ou autrement, et j’ai compilé cette grande liste de titres à propos desquels les gens veulent voir des vidéos. Sur YouTube, des créateurs peuvent se sentir obligés de produire des vidéos sur certains sujets parce que ceux-ci sont populaires, ou parce que leur public est intéressé. Et donc, je ne voulais pas me sentir obligé de faire quoi que ce soit, mais en même temps, je veux produire des vidéos sur des jeux qui intéressent les gens », mentionne Mandy.
« Et donc, si j’ai envie d’un certain style de jeu, je peux simplement regarder cette liste, trouver un titre qui correspond et publier une vidéo par la suite », ajoute-t-il. « Je pense donc qu’il n’y a pas de thème central », poursuit le jeune homme au bout du fil, en parlant des 358 jeux présents sur cette fameuse liste qui est accessible en ligne. « C’est le travail d’une vie », reconnaît-il.
Au fil des années, si le processus de production des vidéos est demeuré sensiblement le même, l’équipement, lui, a changé. « Au départ, je n’avais pas de tapis au sol, ni de mousse pour insonoriser (sur les murs). J’enregistrais dans une pièce avec du plancher en bois, et je devais enregistrer dans les pires conditions possibles, ce qui me forçait à faire beaucoup de montage. Au début, je ne me concentrais pas sur les améliorations apportées aux jeux après leur lancement, par exemple s’il existait un correctif pour jouer à un jeu en mode panoramique. Ensuite, je me suis dit que je ferais aussi bien d’informer les gens pour qu’ils puissent profiter au maximum des jeux », indique Mandalore Gaming.
« Cela a été reçu de façon très positive; l’inconvénient, c’est que je reçois régulièrement des courriels de gens qui me demandent mon aide. Je suis un peu devenu le responsable du soutien technique », poursuit-il en riant.
Une communauté à la fois proche et lointaine
Avec ses 270 000 abonnés sur YouTube, ainsi qu’avec son compte Patreon, où les internautes peuvent transférer de l’argent sur une base mensuelle pour aider à financer le processus de production, Mandalore Gaming se retrouve dans une position particulière.
« C’est étrange, parce que je connais des gens qui ont des endroits spécifiquement dédiés à leur communauté, comme une section de Reddit, ou un site web… Je n’ai rien de tout cela. Je ne pense pas que cela m’a affecté comme cela aurait pu se produire. Je crois que je n’ai jamais perdu cette individualité avec les internautes, je n’ai pas vraiment modifié des vidéos en réponse à des commentaires, bien qu’il soit intéressant de voir des choses revenir régulièrement du côté des internautes. Si cet effet de la communauté a une influence sur moi, je ne peux pas le dire.)
Ce qui a changé, toutefois, c’est sans doute ce besoin de publier régulièrement des mises à jour sur l’avancement de son travail, voire sur son état de santé. De récents problèmes de dos l’ont forcé à prendre du repos et à suspendre les paiements via Patreon, ce qui a été accompagné de divers messages destinés aux abonnés pour expliquer la situation.
« Ça a été difficile, pour moi, de trouver la bonne façon de faire. Quand vous dites quelque chose de personnel en ligne, c’est disponible pour l’éternité. J’essaie donc généralement de ne rien dire de ce genre. Quand j’ai suspendu Patreon, il y a eu suffisamment de gens qui sont venus me demander ce qui se passait pour que je sente que j’avais un genre de responsabilité et qu’il valait mieux que je soit proactif pour expliquer ce qui se passait. Les rumeurs commençaient à aller bon train, et certaines personnes disaient que j’étais sur mon lit de mort, et pas seulement que je me sentais misérable chez le chiro! »
« C’était un peu bizarre de m’adresser à tous ces gens anonymes en ligne, poursuit Mandalore Gaming, mais j’ai déjà travaillé dans un environnement corporatif, et je vois un peu Patreon comme un gros conseil d’administration, et que je dois donc présenter des mises à jour, parce que mes abonnés sont essentiellement des investisseurs. »
Trois jeux essentiels
Quels sont donc les jeux favoris de Mandalore Gaming? Le YouTubeur ne donne que trois titres, mais ceux-ci semblent bien résumer son parcours et ce qui l’attire dans le domaine.
- The Elder Scrolls III: Morrowind
- « C’est certainement mon jeu préféré, même si ce jeu a tellement de problèmes… La première fois que j’y ai joué, c’était sur Xbox, et je ne savais pas beaucoup de choses sur ce titre. C’était la première fois où je jouais à un titre qui avait autant d’interactivité dans un si grand espace. Je pouvais aller dans cette maison et déplacer des livres, puis traverser tout le pays… Il y avait cette impression de gigantisme. Le jeu est resté longtemps dans ma tête. Cela aidait que ce jeu était si amusant, il y avait tellement de choses à faire! Mais oui, il y avait beaucoup de problèmes, y compris avec le combat. Je détesterais faire une vidéo sur ce jeu, mais oui, c’est purement de la nostalgie qui fait en sorte que c’est mon jeu favori. »
- Pathologic 2
- « C’est un jeu récent, qui est sorti en mai; j’ai vraiment aimé comment le jeu venait vous chercher, vous forcer à accomplir plusieurs actions à tous les jours, même si vous ne pouvez clairement pas tout gérer en même temps, ce qui vous force à choisir. Je pense que cela est intéressant: j’aime vraiment les jeux où les principes fondateurs ne pourraient pas fonctionner à l’extérieur d’un jeu, à l’image de Metal Gear Solid 2. J’ai vraiment apprécié cela, même si Pathologic 1 avait peut-être certains aspects plus intéressants, mais c’était un jeu pénible… La suite a tellement d’éléments qui force à sortir de sa zone de confort et qui nous oblige à agir de façon indépendante, sans qu’on nous tienne par la main constamment. J’ai aimé que le jeu me traite comme un adulte, qu’on ne fasse pas le travail à ma place. Je suis peut-être un accro à la souffrance, qui sait? Je me suis bien amusé! »
- Total War: Warhammer
- « Ce jeu est sorti en… 2016, je crois? Le deuxième jeu, l’expansion glorifiée, est sortie en 2017. Je ne connaissais que quelques trucs seulement à propos de l’univers fantastique de Warhammer, mais j’ai joué à Medieval 2: Total War, ainsi qu’à d’autres titres, puis j’ai abandonné la série pendant plusieurs années. J’apprécie la variation dans les unités et les styles de jeu. Car si les jeux à saveur historique sont intéressants, ils sont limités parce qu’il faut respecter le cadre de l’authenticité ou de la fidélité historique. Vous ne pouvez pas avoir un dragon, il faut plutôt avoir des types avec des lances. Je pense qu’en ce moment, avec leur engin graphique, les développeurs ne peuvent pas encore faire énormément de choses, mais le jeu qui existe en ce moment est un bon compromis, j’ai beaucoup de plaisir à y jouer.
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