L’application mobile FaceApp, particulièrement populaire sur les réseaux sociaux depuis le début de la semaine, entre autres grâce à sa fonction de « vieillissement » des internautes, doit faire l’objet d’une enquête du FBI et du gendarme des marchés financiers, la Federal Trade Commission, réclame Chuck Schumer, chef de la minorité démocrate au Sénat des États-Unis.
Dans une lettre adressée mercredi aux deux directeurs de ces agences fédérales, M. Schumer dit « s’inquiéter » des répercussions de cette application, dont le développeur est sis à Saint-Pétersbourg, en Russie, en raison de « possibles risques à la sécurité nationale », ainsi qu’en matière de vie privée « pour des millions d’Américains ».
À l’aide de l’intelligence artificielle, FaceApp « vieillit » donc les utilisateurs de l’application mobile. Ce faisant, toutefois, le logiciel exige l’accès complet aux photos desdits utilisateurs, ainsi qu’à de nombreuses données personnes, y compris l’historique de navigation et certaines métadonnées. Selon sa politique d’utilisation, par ailleurs, FaceApp et les propriétaires de l’application sont en mesure d’utiliser ou de publier du contenu partagé à l’aide de cette application, et ce sur toutes les plateformes, sans limite de temps, et peut également en tirer profit. Parmi les informations publiées, on pourrait compter les noms d’utilisateur, voire les vrais noms des internautes, sans avertir ces derniers, soutient M. Schumer.
« Dans les faits, offrir un tel accès aux données d’un utilisateur pourrait signifier que toute photo prise par l’application pourrait être utilisée de façon publique ou privée, sans devoir exiger le consentement dudit utilisateur », poursuit le sénateur.
Ce dernier craint aussi que la localisation des serveurs de l’application en Russie puisse ouvrir la voie à une utilisation illégale des données stockées par une tierce partie malveillante – le gouvernement russe, ou encore d’autres entités étatiques, laisse entendre le sénateur Schumer sans l’expliciter directement.
« Comme l’a mentionné le directeur Christopher Wray du FBI plus tôt cette année, la Russie représente toujours une menace en matière de contre-espionnage. Cela serait particulièrement troublant si les informations personnelles de millions d’Américains étaient fournies à une puissance hostile qui est activement engagée dans des cyber hostilités contre les États-Unis », peut-on encore lire dans la lettre.
En ce qui concerne la FTC, le scénateur demande à cette agence de s’assurer que les informations des fonctionnaires américains soient protégées correctement.
Des portes d’entrées anodines
Il ne s’agit pas de la première occasion où une application loufoque, ou encore un quiz en apparence inoffensif représente une porte d’entrée pour espionner des millions de personnes et ainsi dérober leurs informations personnelles pour ensuite les revendre ou les fournir à des tiers dont les motivations sont souvent inconnues.
La plus célèbre de ces affaires est sans doute le scandale Cambridge Analytica, au cours duquel un quiz sur la « personnalité » a permis d’amasser les données de dizaines de millions d’utilisateurs de la plateforme Facebook pour accroître les probabilités d’une victoire de la campagne de Donald Trump lors de la présidentielle de 2016. Les internautes touchés étaient ensuite plus aisément ciblés par des micromessages visant à les convaincre de voter pour le candidat républicain… ou encore de rester chez eux le jour du vote. Le patron de Facebook lui-même, Mark Zuckerberg, a été touché par cette fuite.