À part poser un regard typiquement afro-américain sur le principe, souvent exploité, du changement de corps, le Little de Tina Gordon ne réussit pas vraiment à se démarquer des Freaky Friday, Big, Switch, et autres comédies sur le même thème.
Si, comme plusieurs autres élèves fréquentant le Windsor Middle School en 1993, Jordan Sanders fût victime d’intimidation dans sa jeunesse, c’est maintenant à son tour de mener la vie dure aux autres. À la tête de sa propre start-up technologique, la jeune fille brillante est en effet devenue une diva capricieuse et irascible, qui terrorise ses employés en s’en prenant verbalement (et parfois même physiquement) à eux, et nul ne subit son courroux comme April, son assistante personnelle. Après s’être cruellement moquée d’une magicienne en herbe, Jordan se fait jeter un mauvais sort, et le lendemain à son réveil, elle découvre avec stupeur qu’elle n’est plus âgée de 38 ans, mais bien de treize! Forcée de retourner à la même école où elle a tant souffert, l’impitoyable femme d’affaires devra d’abord grandir émotionnellement, avant de pouvoir retrouver son corps d’adulte.
Loin d’être le premier long-métrage reposant sur le principe d’un échange corporel, Little se présente comme une version inversée de Big qui, au lieu de mettre en scène un enfant se retrouvant dans un corps d’adulte, enferme une femme de 38 ans dans la peau d’un enfant. Si sa distribution, majoritairement composée d’actrices afro-américaines, lui donne une texture unique, son scénario prévisible multiplie les lieux communs, au point où l’on devine sa conclusion après vingt minutes de visionnement. Voir une fillette de treize ans se palper la poitrine en se demandant où sont passés ses faux seins, draguer son professeur, boire de l’alcool, et agir généralement comme une adulte, s’avère parfois amusant, mais les scénaristes ont vite fait le tour, et on peut difficilement qualifier de désopilante une comédie qui, en 2019, fait des gags d’homme perdant accidentellement sa moumoute.
Proche du sitcom, la réalisation de Tina Gordon (qui signe ici son second long-métrage) ressemble à celle d’un millier d’autres films, et la seule touche un peu fantaisiste de Little se trouve du côté des numéros musicaux et des chorégraphies parsemant le montage. Âgée d’à peine quatorze ans, la jeune Marsai Martin fait preuve de beaucoup de naturel dans le rôle principal, mais son interprétation exubérante manque toutefois de nuances. Jouant la version adulte du même personnage, l’actrice Regina Hall est haïssable à souhait, et on regrette un peu qu’elle ne soit présente qu’au début et à la fin de la comédie. Issa Rae (que la plupart ont découvert dans la série Insecure de HBO) complète le trio en campant April, l’assistante et souffre-douleur de Jordan Sanders.
Incluant le film dans tous les formats disponibles (Blu-ray, DVD et copie numérique), l’édition combo Pack de Little est bourrée de matériel supplémentaire, dont une piste de commentaires de la réalisatrice et coscénariste Tina Gordon, un montage des décrochages les plus cocasses, une visite du plateau de tournage avec Marsai Martin comme guide et quelques revuettes portant sur les actrices principales ou les coulisses de certaines scènes, mais il vaut vraiment la peine de regarder Regina Goes Method, un documenteur de six minutes qui expose comment, incapable de sortir de son rôle, l’actrice Regina Hall a eu un comportement odieux avec les membres de l’équipe, et qui s’avère infiniment plus drôle que le programme principal qu’il accompagne.
On sourit parfois en visionnant le film de Tina Gordon, mais comme ils sont moins familiers avec les clichés du genre et les nombreux classiques dont s’inspire Little, cette comédie convenue risque davantage d’être appréciée par les jeunes que par les adultes.
5/10
Little
Réalisation : Tina Gordon
Scénario : Tina Gordon et Tracy Oliver
Avec : Regina Hall, Issa Rae, Marsai Martin, Tracee Ellis Ross, Tone Bell et Justin Hartley
Durée : 108 minutes
Format : Combo Pack (Blu-ray + DVD + copie numérique)
Langue : Anglais, français et espagnol
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