L’impact des initiatives de vérification des faits commence à se préciser. Plutôt que de mesurer cet impact par l’équation irréaliste « ces individus croyaient à cette fausseté et ils n’y croient plus », le changement qu’apporte un texte ou une vidéo de vérification peut se situer sur deux axes: l’audience rejointe et les individus ou les institutions qui doivent se justifier d’avoir diffusé une fausseté.
Dans un texte publié conjointement par les trois médias de « fact-checking » Africa Check (en français et en anglais), l’Argentin Chequado (en espagnol) et le Britannique Full Fact, le directeur de ce dernier, Will Moy, écrit: « Cette audience est souvent plus large et variée que vous l’imaginez, et les moteurs de recherche aident les vérificateurs à rejoindre des millions de personnes qui n’auraient pas été des lecteurs réguliers. Sans compter le travail de plus en plus répandu avec Facebook qui met ce travail en face de certains usagers. »
Ce texte a été publié à l’occasion du 6e congrès annuel des médias vérificateurs de faits (Global Fact 6) qui avait lieu cette semaine en Afrique du Sud. Quelques jours plus tôt, une compilation du site Reporter’s Lab de l’Université Duke, en Caroline du Nord, recensait 188 médias ou sites de « fact-checking », dont le Détecteur de rumeurs — contre 149 l’an dernier.
Will Moy, se référant aux sites originaux du mouvement, dans les années 2000 — les PolitiFact et FackCheck.org — avance qu’on est depuis quelques années passé à une « deuxième génération » de vérificateurs de faits : qui font davantage que publier des vérifications et qui se concentrent sur « ce qu’ils changent et non juste sur ceux qu’ils atteignent ».
Concrètement, cela prend la forme « d’actions » au-delà du texte de vérification. Ceux qui sont plus près du politique — la majorité des 188 — peuvent par exemple demander des comptes à ceux qu’ils ont mis en face de leurs erreurs: demander un rectificatif, faire pression pour qu’ils ne répètent pas la même erreur, etc. D’autres utilisent leur travail « de terrain » comme outil pour aller plus loin: c’est l’éducation aux médias. Informer le public de ce que fait un vérificateur, de la raison pour laquelle il en est arrivé à cette conclusion, sans compter la possibilité d’organiser des conférences et ateliers pour les jeunes et moins jeunes…
L’objectif à long terme est alors un changement d’attitude et de comportement chez le public — plus vigilant face à la désinformation, plus critique, plutôt que désabusé ou cynique devant le « mensonge ». « Ce sera, conclut Will Moy, notre travail que de motiver nos lecteurs réguliers les plus engagés (pour qu’ils) confrontent les gens et les organisations les plus puissants derrière la désinformation ».
Les médias devraient former leurs journalistes à la lutte aux fausses nouvelles