Ils ont d’abord séquencé le génome du blé; désormais, ils ont reconstitué son historique de reproduction. En collaboration avec d’autres chercheurs européens, des scientifiques du Helmholtz Zentrum München, l’Institut allemand de recherche sur la santé environnementale, ont examiné la diversité génétique des variétés de blé. Ils ont ainsi découvert le type de céréales cultivées par nos ancêtres, l’origine du blé contemporain et ce que la Guerre froide a à voir dans ce dossier. Les résultats ont récemment été publiés dans Nature Genetics.
Alors que la population augmente et que les changements climatiques s’aggravent, les ressources alimentaires pourraient être moins abondantes dans un futur proche. Face à ces scénarios peu favorables, les agriculteurs cherchent à accroître la productivité des plantes. Les variétés existantes peuvent-elles être optimisées via des croisements? Pour aider à maximiser la productivité des variétés de blé existantes, une équipe de chercheurs a étudié la diversité génétique de différentes variétés de blés et, ce faisant, a découvert d’étonnants liens avec l’histoire socioculturelle de l’humanité.
Le blé contemporain tient ses origines de ce qui est aujourd’hui la Turquie, alors que cette plante, née il y a environ 10 000 ans, découle d’un croisement entre le blé dur et une herbe sauvage (Aegilops tauschii), tandis que le grain que nous appelons épeautre provient de céréales de la sous-espèce de l’amidonnier et de divers types de blé servant à produire du pain. »
« La présence des plantes cultivées est étroitement associée aux migrations humaines à travers les millénaires », soutient le bio-informaticien Michael Seidel, qui est l’un des principaux auteurs de l’étude. En compagnie de l’autre auteur principal, Daniel Lang, il travaille au sein du groupe Plant Genome and Systems Biology (PGSB) du Helmholtz Zentrum München.
L’équipe du PGSB a identifié trois bassins génétiques, dans des variétés de blé cultivées aujourd’hui, qui sont étroitement liées à des événements historiques: l’un appartenant à une variété à fort rendement domestiquée au Moyen-Orient et qui s’est répandue dans le cadre d’une révolution verte, et deux autres provenant de l’Europe de l’Ouest et de l’Europe Centrale. Ces variétés ont divergé entre 1966 et 1985, dans la foulée des séparations géopolitiques et socio-économiques associées à la Guerre froide. Avec la chute du Rideau de fer, en 1989, les variétés de blé se sont graduellement mélangées de nouveau, comme le révèle leur génome.
De fait, même l’émergence de l’Union européenne peut être constatée dans la génétique du blé d’aujourd’hui. Des variétés qui étaient cultivées principalement en Europe Centrale sont maintenant répandues partout en Europe. « Ces exemples démontrent l’influence des humains sur la distribution et l’évolution des plantes cultivables – et ce au-delà de leur transformation en plantes agricoles », soutient M. Lang.
S’adapter aux transformations
Pour optimiser les variétés contemporaines de blé, il est essentiel d’en connaître les variétés génétiques, soutiennent les chercheurs. Répondre aux demandes alimentaires d’une population mondiale en croissance, tout en respectant les contraintes imposées par une planète au climat changeant, nécessite d’être au fait des caractéristiques principales liées à la reproduction de cette plante. Après tout, le blé, le maïs et le riz sont trois des produits alimentaires les plus usités de la planète.
Conséquemment, les chercheurs impliqués dans l’étude ont identifié des gênes auparavant inconnus qui ont une influence sur le rendement, la période de floraison, la hauteur et la stabilité des plants de blé. Pour Georg Haberer, un autre chercheur du PGSB, ce n’est que le début: « Nous nous attendons à un grand nombre d’études qui s’appuieront sur ces conclusions pour alimenter la recherche en reproduction agricole. »
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