Les livres peuvent brûler. Les ordinateurs peuvent être piratés. Les DVD se dégradent avec le temps. Les technologies pour stocker des informations continuent de s’améliorer, mais des menaces aussi simples que l’eau ou aussi complexes que les cyberattaques peuvent continuer de mettre en danger nos données. Des chercheurs de Harvard envisagent maintenant une solution « permanente »: les protéines.
Selon ces scientifiques, cette nouvelle méthode de stockage de l’information pourrait demeurer stable pendant des millions d’années, est entièrement protégée contre les pirates et, une fois utilisée, ne nécessite aucune forme d’énergie. Tout ce qui est nécessaire est un chimiste, des molécules très abordables et les précieuses informations à préserver.
« Imaginez sauvegarder le contenu de la Bibliothèque publique de New York dans une cuillerée de protéines », menti0nne Brian Cafferty, principal auteur d’une étude qui décrit la nouvelle technique de préservation, et membre de l’Université Harvard. Les travaux ont été effectués en collaboration avec Milan Mrksich et son groupe de l’Université Northwestern.
« Pour l’instant, nous n’envisageons pas que cette méthode puisse faire concurrence aux méthodes de stockage de données existantes », mentionne M. Cafferty. « Nous l’envisageons plutôt comme quelque chose de complémentaire à ces technologies et, potentiellement, d’adapté au stockage d’archives à long terme. »
Les outils chimiques de M. Cafferty risquent de ne pas remplacer l’infonuagique, mais ce système d’archivage offre une alternative intéressante à des outils biologiques, comme le stockage sur ADN, jugent les chercheurs. Récemment, des scientifiques ont découvert comment manipuler les molécules qui contiennent déjà notre code génétique pour y insérer des données supplémentaires. Des chercheurs sont aujourd’hui en mesure de synthétiser des branches d’ADN pour sauvegarder n’importe quelle information, qu’il s’agisse d’une vidéo de chats, de tendances nutritionnelles, ou encore de recettes de cuisine.
Mais si l’ADN est petit comparativement à des puces informatiques, la macromolécules est suffisamment grande dans le monde de l’infiniment petit. Et la synthèse d’ADN nécessite du travail minutieux et souvent répétitif. Si chaque message doit être créé dans son intégralité, le stockage sur macromolécules pourrait devenir long et dispendieux.
« Nous avons exploré une stratégie qui n’emprunte pas directement à la biologie », a précisé M. Cafferty, avant d’indiquer que son équipe s’était plutôt appuyée sur des techniques que l’on retrouve en chimie analytique.
Pour l’instant, l’équipe peut récupérer ses « chefs-d’oeuvre » avec une précision de 99,9%. La vitesse « d’écriture » avoisine 8 octets par seconde, tandis que la « lecture » tourne autour de 20 octets par seconde. Bien en-deçà d’une simple clé USB, bien sûr, mais la « lecture » est ici bien plus rapide qu’avec de l’ADN synthétique.
Ultimement, il est envisageable que de futures « bâtisseurs » de ce genre de bibliothèques puissent acheter des molécules pour environ un cent par 100 mégaoctets d’information.
Et les chercheurs soutiennent que contrairement à d’autres systèmes de stockage sur molécules, qui s’appuient sur une molécule en particulier, cette approche pourrait fonctionner avec n’importe quelle molécule maléable, du moment qu’elle puisse être manipulée pour la séparer en sections séparées.