On nous promettait la fin de l’Histoire avec un grand H avec la chute de l’Union soviétique. Depuis, pourtant, les mouvements sociaux et les contestations politiques se multiplient, y compris depuis la dernière grande crise économique. Rencontre avec les deux metteurs en scène d’Intersections, un regard différent sur ces diverses révoltes bientôt joué à La Chapelle.
Installés au Café Cherrier, Mireille Camier et Ricard Soler Mallol expliquent avoir cherché à créer une oeuvre qui mettrait de l’avant les « soulèvements » vécus par chacun d’entre eux dans leur pays respectif, soit le printemps érable au Québec et à Barcelone, en Espagne.
« On a vraiment allumé à l’idée de mettre en relation des gens ayant vécu de tels mouvements », indique Mme Camier. Après tout, poursuit-elle, la technologie et les moyens de communication permettent aujourd’hui de relier instantanément des gens de partout sur la planète. Intersections rassemblera ainsi des artistes et témoins de divers mouvements sociaux survenus un peu partout dans le monde ces 10 dernières années. Outre le Québec et l’Espagne, on comptera également des intervenants de la Tunisie, de l’Iran ou encore Taïwan. Le tout en direct, devant un public qui sera lui aussi appelé à participer à ce docu-théâtre.
« Oui, c’est un gros dossier; au départ, le fait que nous soyons deux là-dedans nous permet d’aller plus loin, mais ça se veut aussi très simple », mentionne Mme Camier.
« Ça commence avec la connexion Montréal-Barcelone, et puis ça s’élargit à des endroits comme Téhéran et Taipei. C’est un regard global sur le sujet de la révolution. On pense que tout le monde a un désir de changement, et l’a ressenti à un moment dans sa vie », ajoute M. Soler Mallol, avant de préciser que l’idée n’est pas nécessairement d’aborder le côté politique de la chose, mais plutôt de se concentrer sur « le sentiment que l’on souhaite que quelque chose change ».
Sur le plan technique, Intersections joue d’audace: puisque le tout est présenté en direct, chaque soir vers 20h, heure de Montréal, les participants installés ailleurs dans le monde devront consacrer beaucoup d’énergie pour tenir jusqu’à la fin de la représentation. Y compris le comédien-citoyen installé à Téhéran, pour qui le spectacle de Montréal débutera à… trois heures du matin.
À l’image de la tentative de révolution à Téhéran, en 2009, bien des soulèvements sociaux survenus depuis 2008 ont été plus ou moins couronnés de succès, lorsqu’ils n’ont simplement pas été réprimés dans le sang, comme en Syrie et en Égypte. Même au Québec, le Parti québécois, qui a remplacé les libéraux après le printemps 2012, n’a été au pouvoir que pendant 18 mois, avant de céder la place au Parti libéral, puis à la Coalition avenir Québec. Faut-il se résigner à voir ces mouvements perdre de leur élan et disparaître?
« J’ai l’impression que malgré le fait que nous vivions dans une période complexe, avec la montée de la radicalisation, le spectacle nous permet de nous questionner à savoir si nous avons encore une volonté de transformation. Notre coeur bat-il toujours? Peut-on toujours y croire? Je crois qu’il reste de l’espoir », conclut Mireille Camier.
Intersections, de Ricard Soler Mallol et Mireille Camier, présenté à La Chapelle du 3 au 13 avril.
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