Sorte de Michael Crichton de la bande dessinée, Robin Cousin utilise les avancées de la science pour créer des intrigues inventives et palpitantes, et le bédéiste effectue sa toute première visite en sol québécois aujourd’hui même pour lancer Des milliards de miroirs, son plus récent album.
Que ce soit Le Profil de Jean Melville, un polar abordant les questions de collecte de données et de vie privée à travers la commercialisation de lunettes intelligentes, ou Le chercheur fantôme et sa mystérieuse fondation nous plongeant au cœur même des algorithmes, Robin Cousin a l’habitude d’utiliser les enjeux soulevés par les percées scientifiques et les nouvelles technologies comme fil conducteur de ses bandes dessinées. Ce n’est pas d’hier que les légions de chercheurs tentent de trouver des preuves que la vie existe ailleurs dans l’univers, mais Cousin quant à lui imagine quelle serait la réaction de l’humanité en découvrant une planète habitée à des millions d’années-lumière de la nôtre, dans Des milliards de miroirs.
À mi-chemin entre Children of Men et Another Earth, la très cinématographique bande dessinée Des milliards de miroirs dépeint une Terre où les derniers mammifères sont enfermés dans des conservatoires zoologiques, où l’eau est strictement rationnée, et où le régime alimentaire des humains est désormais constitué de grillons, de fourmis et de chenilles. Suite à la mise en orbite d’un « hypertélescope » composé de millions de miroirs, l’Agence spatiale européenne observe d’intrigantes lueurs sur Gamma Cephei Bb, laissant présager qu’elle est habitée par une forme de vie intelligente, et rapidement, la surface de cette planète deviendra un véritable miroir déformant, sur lequel l’humanité projettera ses propres peurs et espoirs.
En plus d’un monde sur le bord de l’extinction dont la proximité avec le nôtre dérange, Des milliards de miroirs personnifie les réactions que l’humanité risque de manifester suite à la découverte de vie extraterrestre par le biais d’une riche galerie de personnages, dont une scientifique convaincue que ces êtres sont hostiles, son mari, qui tente de garder en vie les derniers mammifères en dépit des coupes budgétaires, un blogueur trouvant ridicule qu’on s’émeuve de ce qui se passe à 45 millions d’années-lumière alors que la Terre se meurt, ou le gourou d’un groupe religieux qui avait « prédit » l’existence de cette planète et prétend communiquer télépathiquement avec ses habitants. Le résultat est un album qui, en plus de l’angle scientifique auquel Cousin nous a habitués, est également très spirituel.
Robin Cousin a acquis beaucoup de maturité graphique en l’espace de quelques années, et Des milliards de miroirs n’est pas seulement son récit le plus touchant à ce jour, il est aussi la plus belle œuvre que l’artiste ait produite. Ses illustrations très stylisées aux lignes de contour assez grasses possèdent beaucoup de charme et de vivacité, et ses personnages aux têtes arrondies rappellent parfois ceux de l’illustrateur québécois Éric Godin. En n’essayant pas d’être réaliste, sa coloration, qui couvre des pages entières d’orange brûlé, de turquoise, de mauve ou de framboise, ajoute de la profondeur à chacun de ses dessins, en plus de contribuer à donner une impression d’étrangeté qui sert à merveille l’univers décalé du récit.
Le Cousin européen effectuera sa toute première visite au Québec pour le lancement montréalais de l’album Des milliards de miroirs à la librairie Le Port de tête ce lundi 11 mars dès 18h00. Il s’agit d’une occasion en or pour rencontrer cet artiste visionnaire, et repartir avec une copie dédicacée de cette magistrale œuvre d’anticipation aux accents métaphysiques.
Des milliards de miroirs, de Robin Cousin. Publié aux Éditions FLBLB, 248 pages.
Lancement 11 mars 2019, de 18h00 à 21h00
Librairie Le Port de tête
262 avenue Mont-Royal Est, Montréal
Page Facebook de l’événement: https://www.facebook.com/events/2116415788649680/
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