Présentée il y a quelques années au Festival Jamais Lu, la pièce de Maxime Brillon au titre interminable, Nous irons cirer nos canons numériques dans un sweatshop portugais, est montée avec bonheur au Théâtre aux Écuries, dans une mise en scène de Justin Laramée.
Peu de décors pour cette représentation sinon de belles constructions lumineuses au laser qui nous mettent bien dans l’ambiance futuriste du récit. La pièce est surtout portée par un texte brillant et on ne peut plus surprenant par la richesse de sa langue; un texte dit à toute vitesse par des acteurs impeccables qui font eux-mêmes décor puisqu’ils se métamorphosent, entre autres choses, en animaux d’un zoo…
Dans un futur proche, encore plus envahi par les gadgets et autres puces électroniques auxquels nous serons tous totalement dépendants, quatre adolescents (deux garçons, Chris et Paulo et deux filles, Jeanne et Simone) décident de partir aux États-Unis dans le pick-up du père de Jeanne pour retrouver le père – qui n’est pas son père – de Paulo. Car tout en jouant à un jeu électronique avec son ami Chris, Paulo vient de découvrir dans une très vieille vidéo de YouTube restée gravée à jamais sur le web que le père qui l’a élevé, victime d’un accident aux testicules, ne peut pas l’avoir engendré…
Expliquée ainsi, l’histoire peut sembler embrouillée, mais elle ne l’est pas. Et si la langue de Maxime Brillon est particulièrement riche et complexe, s’il fait en sorte que les ados – comme tous les ados – parlent sans cesse, à toute allure et en même temps, glissent dans leurs propos une multitude de références et de mots en anglais, et passent du coq à l’âne tout en maniant leur téléphone, leur planche sans roulette (on est dans le futur) ou leur console de jeu, bizarrement, le spectateur parvient à tout suivre et rit beaucoup de ce feu d’artifice verbal.
Pour quelles raisons le voyage des quatre adolescents va-t-il se terminer dans une école de cirque, après une étape dans un zoo où ils vont retrouver le père de Jeanne et la mère de Chris? Je laisse au spectateur le plaisir de le découvrir.
Mais ce que Maxime Brillon a bien saisi, c’est que futur ou pas, les humains que nous sommes ne changeront pas fondamentalement. Les enfants s’engendreront toujours de la même manière et les ados, tout comme leurs parents (qui en réalité ne sortent pas vraiment de cette adolescence pour devenir les adultes qu’ils croient), ont et auront toujours besoin de savoir d’où ils viennent et de plaire aux autres pour les aimer et être aimés par eux.
Nous irons cirer nos canons numériques dans un sweatshop portugais, du 26 février au 16 mars 2019 au Théâtre aux Écuries.
Production: Collectif des canons numériques en collaboration avec Tôle
Texte: Maxime Brillon
Avec: Maxime Brillon, Marjorie Gauvin, Marie-Ève Groulx, Karlo Vince Marra, Lise Martin, Louis-Olivier Mauffette, Frédéric Paquet et Joakim Robillard
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